Aux dernières nouvelles, les institutions culturelles de la république française ont décidé de bannir l’usage des chiffres romains. Ils ne sont plus compris, nous dit-on. Simple épiphénomène d’une culture à la dérive ? C’est certain, mais surtout signe d’une destruction politique organisée !

En substituant l’« Education nationale » à l’« Instruction publique » de Jules Ferry, le ministre Anatole de Monzie avait fait effectuer en 1932 un glissement radical en faveur de la main-mise du pouvoir républicain sur la société française. « Instruire », c’est simplement donner des connaissances ; « éduquer » (é-duquer) c’est conduire, conduire au-delà, mener au développement maximum, physique, moral, intellectuel ; la même intention donc qu’« élever », (é-lever), mener plus haut, mettre à un niveau supérieur.

Evidemment, pas plus l’un que l’autre n’incombe en quoi que ce soit au pouvoir politique. Mais si, au terme d’à peine un siècle d’« éducation nationale » républicaine, l’un de ses agents les plus vertueux, J.P. Brighelli, a pu, dès 2005, la dénoncer comme la « fabrique du crétin », ce qui est ainsi posé, c’est d’abord un problème fondamentalement politique. Il relève de la simple constatation que partout, au lieu d’é-duquer, au lieu d’é-lever, l’appareil républicain s’est constamment voué au nivellement par le bas, à l’infantilisation, au déracinement, à la promotion d’une société d’inculture massive, et finalement, au crétinisme généralisé qui fait les dévots électeurs-contribuables. Interdits les échappatoires du passé ! Seule la fange de l’instant convient à leurs soumission.

On a épuré Hugo (raciste) comme en d’autres temps on avait épuré La Fontaine (croyant) ; il est question de réécrire Molière (pensez donc : il n’est plus compris!). Mais, pour les enfants, n’a-t-on pas déjà réécrit Les Six compagnons, ramenés au présent de l’indicatif et qui, le dimanche, ne vont plus à la messe, mais au marché. Au fond, les ennemis de la France connaissent aussi bien que nous la phrase du cardinal Mercier : « La France est une grande nation, mais, pour le demeurer, il faut qu’elle s’en souvienne. »

Philippe Champion

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