Ce n’est pas qu’il y ait le moindre plaisir à revenir sur un sujet assez commun et déjà abordé ; mais il serait plus injuste de nous intenter ce procès-là que de faire comme si la plus pressante actualité n’étalait pas sous nos yeux le fait que la violence est bien devenue l’un des éléments les plus fondamentalement constitutifs de la vie sociale française ; et donc, hélas ! un inépuisable et justifié sujet de réflexion politique. « Une odeur de violence plane désormais sur la France », écrit J.-P. Brighelli ; c’est peu dire ! Et de constater : « On s’enflamme pour des riens. On agresse pour pas grand-chose. On attaque les forces de l’ordre qui n’osent pas riposter, parce qu’un coup de feu tiré aujourd’hui serait payé très cher demain. »

Deux points peuvent fixer notre réflexion.

Le premier est la constatation du fossé qui ne cesse de s’élargir entre ceux pour qui la violence est devenue le mode privilégié de manifester leur existence, et les autres, boursouflés de couardise légaliste, tristes géniteurs de lendemains qui déchantent, parce qu’ils témoignent à chaque instant de la profonde vérité de l’affirmation de Soljénitsyne, selon qui « celui qui n’est pas intérieurement préparé à la violence est toujours plus faible que celui qui l’exerce ».

Le second point, infiniment plus grave, concerne l’action de l’État républicain, apparemment incapable d’apporter une réponse proportionnée à ces violences multipliées et multiformes. Pourquoi ? Par déni de réalité, certes ; déni par peur, par sédimentation de peurs ; mais quelles peurs exactement ? Peur de l’impuissant qui se retrouve soudain face à un adversaire trop fort pour lui ? Sans doute un peu ; mais surtout panique, véritable inhibition plutôt, qui l’obligerait à constater que les sacro-saints principes fondateurs de la société multiethnique et multiculturelle promue depuis plus d’un demi-siècle ne sont que les germes morbides de la désagrégation de la France ; une inhibition à l’image caricaturale de cet imbécile de gauche qui tente de persuader que des violences ethniques sont en fait des émeutes de la misère.

Alors, au contraire de Brighelli qui annonce la guerre civile, on peut penser que le « coup de feu tiré aujourd’hui », au nom d’un État soucieux de l’union qui préside au bien commun, en éviterait sans doute demain de bien plus nombreux et de bien plus dramatiques, qui seraient ceux d’une guerre étrangère dont l’ennemi a été installé dans la Cité.

Philippe Champion

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