» Il vint par bonheur un grand roi, Philippe Auguste, car beaucoup d’ennemis menaçaient la France.

Il faisait rude guerre aux Anglais qui avaient alors de très méchants rois et il leur reprit autant de provinces qu’il put. Mais tandis qu’il était occupé avec le roi d’Angleterre, l’empereur d’Allemagne pensa que l’occasion était bonne d’entrer en France. Il se flattait de ne faire de Philippe-Auguste qu’une bouchée. Et il avait avec lui une grande armée et beaucoup de seigneurs allemands qui comptaient sur un riche butin. D’avance, ils se partageaient notre pays, s’attribuant chacun un morceau.

Alors Philippe-Auguste convoqua tous ceux qui lui étaient fidèles, chevaliers, notables et manants. Ils vinrent en grand nombre. Et les communes, reconnaissantes au roi de ce qu’il avait fait pour elles, lui envoyèrent leur milices.

On marcha au devant de l’ennemi sans lui donner le temps d’avancer. Et il y avait beaucoup de discipline et d’enthousiasme chez les Français, qui comprenaient que la patrie était en danger et qu’ils cesseraient d’être libres si l’empereur Othon était victorieux.

On rencontra les Allemands et leurs alliés près de Bouvines, où la bataille s’engagea. Philippe-Auguste, avec l’oriflamme de Saint-Denis, était le premier au combat. Et la mêlée était si furieuse, qu’à un moment il fut renversé de son cheval et il aurait été tué si quelques chevaliers et des gens des communes n’étaient venus en grande hâte à son secours.

Il fallut frapper d’estoc et de taille tant les ennemis étaient nombreux. L’évêque de Beauvais lui-même prit part au combat. Et comme un évêque ne pouvait pas verser le sang, il s’empara d’une massue, sorte de gros bâton très lourd, et rompit les membres de tous les Allemands, Flamands et  Anglais qu’il rencontra. Il demanda seulement qu’on ne dît pas que c’était lui qui avait fait ce grand abatis.

Les Français tapèrent si bien, que l’empereur d’Allemagne, après avoir failli être pris, s’enfuit au triple galop avec les soldats qui lui restaient.

Philippe-Auguste, vainqueur, rentra à Paris. Partout sur sa route, les cloches sonnaient et on lui jetait des fleurs. Il était suivi du comte de Flandre, Ferrand, allié de l’empereur Othon et qui avait été fait prisonnier. Et comme Ferrand était enchaîné, on lui criait : « Ferrand, te voilà ferré ! »

Ce n’était pas la première invasion que la France subissait. Mais, cette fois, le roi de France l’avait repoussée. Plus encore qu’avant, on eut confiance en lui. Car c’était lui maintenant qui protégeait contre les envahisseurs pillards.

A l’abri du péril, Philippe-Auguste gouverna sagement. Le royaume devint prospère. De beaux monuments furent élevés à Paris, entre autres Notre-Dame, où l’ont mit la statue du vainqueur de Bouvines. C’est de ce temps-là que datent ces belles cathédrales qui semblent monter vers le ciel comme une prière et qui dans toutes nos grandes villes, attestent la foi de nos pères « 

Jacques Bainville, Petite Histoire de France 

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