RIP Monique Lainé

Entre les bras de l’Espérance et de l’Amour. »



Les privilégiés qui disposent du Dictionnaire politique et critique de Charles Maurras pourront y relire les pages émouvantes et pertinentes consacrées dans le tome deuxième à la sainte de la Patrie :

– Jeanne d’Arc et les Républicains (Action Française du 5 juin 1913, Pp.347-349).
– Sainte Jeanne d’Arc (Action Française du 7 avril 1919, pp. 349-351 )
– La figure de la Patrie (Action Française du 8 mai 1927, pp. 35 1-354)
– Autres leçons de Jeanne d’Arc (Action Française du 13 mai 1928, pp. 354-355 ). Nous en donnons ici un bref extrait.
« Un autre trait doit être observé par toute la vie tragique de Jeanne d’Arc. Trait non de classe, mais de race historique, particulier à tout ce qui s’inspire un peu largement des traditions orales ou écrites de la France : c’est la florissante vigueur, la jeune hardiesse, la souplesse de sa raison. Les amateurs de poésie pure croient que la raison sèche l’âme ou opprime le cœur. Mais ont-ils apporté une once de critique à la lecture de l’interrogatoire de Jeanne ? Face aux arguties captieuses, une logique ailée s’allie au jugement le plus délicat. Il est de Jeanne d’Arc, le grand mot par lequel est jugée éternellement la méthode de diffamation assassine et qu’elle a dû jeter à quelque valet de greffier qui lui reprochait de n’avoir servi ni l’Eglise ni la Patrie : – Ah! Vous écrivez bien ce qui est contre moi, mais vous ne voulez pas écrire ce qui est pour moi! «
« Ainsi la reine vierge des bons guerriers d’Action française pourrait aussi servir de protectrice et d’intercesseur à ceux de leurs amis qui ont été conduits à faire un usage public des puissances de la persuasion et de la raison. Elle en prêche l’exemple, et elle en donne les leçons, qu’il s’agisse de distinguer ou de réfuter, de conclure ou de rectifier. Ce jeune chef de guerre dont les inventions stratégiques sur le champ de bataille frappent les hommes de métier d’une stupeur pleine d’admiration, la voilà sans arme et sans compagnon dans la geôle, dans le prétoire. Réduite à elle seule, sans avocat ni conseiller, elle invente cette défense qui répand des nappes de lumières égales, traversées de soudaines brusqueries comparables aux divines fulgurations. L’amalgame inouï du sublime avec le bon sens !
« C’est contre cette enfant unique de la France, contre cet abrégé de tout ce que la chrétienté médiévale a produit et peut-être a rêvé de plus pur, que l’envahisseur étranger avait suscité toutes les autorités qu’il avait pu réunir, suborner, soudoyer. Je lis dans un discours, prononcé à la Cathédrale d’Orléans, par un évêque français, ce jugement terrible porté sur les juges ecclésiastiques par qui le bûcher de Jeanne fut allumé : Quels juges! Des hommes, a-t-on dit, dont la science théologique n’était qu’un moyen de faire leur carrière ; un Pierre Cauchon, devenu évêque et qui aspire au siège archiépiscopal de Rouen ; un Jean Beaupère, qui, lui, bien que manchot de la main droite, a su de la gauche faire râfle de riches prébendes ; un Nicolas Midy qui cumulait « tout, les titres et les bénéfices, les violences et les hontes » ; et d’autres personnages qui, quelques mois plus tard, au Concile de Bâle, feront figure de schismatiques.
« C’est devant un pareil tribunal que Jeanne subira d’interminables interrogatoires où par l’imprévu, la multiplicité et l’incohérence voulue des questions, on essaiera de la troubler et de la déconcerter. Quel drame! D’un mot, d’un geste, quand il semble qu’elle est perdue, elle écarte les subtilités dont on cherche à l’embarrasser, repousse les accusations mensongères, démasque les perfidies cachées et s’élève dans une atmosphère de pureté et de vérité ».
« Elle s’élève, c’est cela! Au-dessus des douleurs de la sentence. Au-dessus de la honte du tribunal. Dans cette vérité qu’elle sert et qui la défend. Une vérité qui la garde intacte, comme un cristal, comme un diamant, comme les pures flammes arrondies en bouquet autour de la martyre, au-dessus de la corruption et que rien ne saurait corrompre. Ce qui est, est. Ce qui a été, a été. Il n’y a rien de plus inviolable que les mérites et l’honneur d’un noble passé. Heureux qui appuie là-dessus les forces, les espoirs, les desseins du noble avenir ! »
N. B. Charles Maurras est encore l’auteur d’un petit livre introuvable Méditation sur la politique de Jeanne d’Arc, illustré par Maxime Real de Sarte.

L’ Action Française sera présente le dimanche 13 mars à 14h30 à la cérémonie au cimetière de Bourg-la-Reine (92) sur la tombe de Jean Bastien-Thiry. Nous invitons nos amis à prendre part aux nombreuses cérémonies organisées à la mémoire de ceux qui sont morts pour que vive la France en Algérie.
Messes commémoratives
– A Paris : messe le samedi 26 mars à 10h30, en l’église St Nicolas du Chardonnet (75005) pour les victimes de la fusillade du 26 mars 1962 à Alger
– A Antibes : samedi 26 mars : messe à 18h15 en l’église du Sacré-Cœur pour tous les martyrs de l’Algérie Française
– A Montauban : samedi 26 mars à 10 heures : messe en l’église de Gasseras, Nativité Notre Dame, pour tous les martyrs de l’Algérie Française.
Messes pour le colonel Jean Bastien-Thiry
. A Fabrègues (34) : messe le samedi 5 mars à 11h15 en l’église Notre Dame de Fatima, 1 rue Neuves-des-Horts
. A Fréjus (83) : messe le samedi 2 avril à 9 heures en la cathédrale de Fréjus
. A L’Illiers l’Evêque (27770) : messe le dimanche 13 mars à 8h30 à la chapelle du Brémien, 2 rue de l’Orée du Bois
. A Lourdes : messe le vendredi 11 mars à 11 heures à la Maison Saint Ignace, 22 rue de Sacré-Cœur
. A Lyon : messe le vendredi 11 mars à 18h30 au prieuré Saint Irénée, 23 quai Perrache (69002)
. A Nancy : messe le vendredi 11 mars à 18h30 à la chapelle du Sacré Cœur, 65 rue maréchal Oudinot
. A Savigny-sur-Clairis (89) : messe le jeudi 24 mars à 17 heures à l’église de Savigny
. A Toulon : messe le dimanche 13 mars à 10h30 en la cathédrale de Toulon
. A Toulouse : messe le vendredi 11 mars à 9h30 au Prieuré Saint Dominique, 2245 av. des Platanes, 31380 Gragnague

Il y a 50 ans, le 6 janvier 1972 disparaissait à Annonay (Ardèche), Xavier Vallat. C’était le Jour des Rois, comme il convenait à cette âme de vaillant serviteur de la cause capétienne. C’est avec émotion que je rends hommage à ce compagnon de captivité de Charles Maurras, qui fut aussi un grand politique et un grand écrivain et qui, bien que mon aîné de plus de cinquante ans, m’honorera, au cours de mes bien lointaines jeunes années sur notre terre commune et tant aimée du Vivarais (département de l’Ardèche), d’une amitié dont je mesure encore chaque jour tout le prix.
Bien que né le 23 décembre 1891,par suite des hasards des nominations de son père maître d’école, à Villedieu, petit village de Provence, Xavier Vallat appartenait à une solide lignée paysanne implantée à Pailharès, en haute Ardèche. En lui je voyais s’irradier l’âme ardente, passionnée, courageuse, que le contact familier avec un sol âpre et avare ramène sans cesse aux réalités. Comme pour tous les grands sages du Vivarais, comme pour jadis Olivier des Serres, comme pour son contemporain et ami Gustave Thibon, le patriotisme était chose concrète, sentie, charnelle et trouvait tout naturellement sa plus haute expression dans la fidélité à son père, à un être de chair et de cœur, héritier d’un domaine à faire prospérer, en somme dans la fidélité au roi de France. Enfin il avait hérité du catholicisme de ses ancêtres (« Catholique et français toujours ») sans cesse ravivé par les humbles pèlerinages qui parsèment les monts où vint mourir, après les avoir rechristianisés, entre d’impressionnantes forêts de sapins le 31 décembre 1640, à la Louvesc, le grand saint Jean-François Régis…..
Cette personnalité si riche de sève, de caractère et d’âme, était douée d’une franche gaieté et d’une verve de bon aloi, comme en témoignent les contes qu’il publia en 1923 aux Editions du Pigeonnier fondées par son ami d’enfance le délicieux poète Charles Forot. Vallat se mit très tôt au service de la France. Dès la Grande Guerre sa conduite fut celle d’un héros: revenu deux fois au front après avoir été blessé, il dut le 30 mai 1919 dans la Somme être amputé d’une jambe dans d’atroces souffrances. Mais conscient de ne faire que son devoir, il garda toujours un optimiste communicatif. Les électeurs de la circonscription de Tournon-Annonay le désignèrent le 16 novembre 1919 comme député sous le signe de l’Union sacrée. Réélu en 1928, devenu en janvier 1940 vice-président de la Chambre des députés, il ne cessa de lutter contre l’individualisme athée. Il était alors l’orateur talentueux de la Fédération nationale catholique, mais il gardait des relations toujours cordiales, même enjouées, avec ses collègues députés de tous bords.
Pragmatique plutôt qu’idéologue, il prit conscience d’un problème juif comme beaucoup de Français au fur et à mesure que grandissait l’influence de cette communauté dans les années 1930. Dans son livre point du tout complaisant mais honnête et intelligent, consacré à Xavier Vallat. Du nationalisme chrétien à l’antisémitisme d’Etat (Grasset 2001), Laurent Joly reconnaît que son discours du 5 juin 1936 déplorant qu’avec Léon Blum « pour la première fois ce vieux pays gallo-romain (serait) gouverné par un juif » ne déclencha guère de réactions hostiles dans l’opinion. Vallat, explique Laurent Joly, voyait la question juive comme un aspect d’un danger autrement plus grave: le péril communiste. Il lui apparaissait que les Juifs, par leur appartenance au peuple élu, étaient avides de domination et des biens de ce monde et pouvaient faire le lit autant de « la fortune anonyme et vagabonde » que de l’esprit de dilution et de révolution, ce que disait d’ailleurs aussi l’israélite Bernard Lazare.
Et dans une démocratie qui ne cesse d’émietter la société, il lui apparaissait que cette communauté pouvait facilement devenir un Etat dans l’Etat. Survint la débâcle de 1940, Vallat se retrouva tout naturellement aux côtés du maréchal Pétain qui, face à une guerre que d’autres avaient voulue et si mal préparée, agissait courageusement pour épargner aux Français les pires malheurs. En tant que secrétaire général des Anciens combattants ou fondateur de la Légion française des Anciens combattants destinée à opérer le redressement civique et moral de la France, ou encore en tant que Commissaire général aux questions juives, ou en tant que rédacteur d’un statut des juifs, jamais Vallat, héritier des plus hautes traditions catholiques et françaises, ne montra une attitude de soumission envers l’Occupant national-socialiste qui en vint à exiger son départ le 19 mars 1942. Laurent Joly, qui ne tombe pas dans le travers de ceux qui jugent les comportements de 1942 en fonction d’une « Solution finale » dont on n’entendit parler qu’en 1945, relève les efforts qu’accomplit Vallat en faveur des juifs anciens combattants de même que sa véhémente protestation après la rafle de décembre 1941, de même que les conseils insistants de prudence qui permirent à son ami juif le docteur Nora d’en sauver plusieurs milliers.
1944 : victoire de la bêtise, du mensonge et de la haine. Vallat qui venait de prendre, à Radio-Journal, la succession de Philippe Henrio assassiné, fut arrêté en août. Traîné de prison en prison, il s’entendit condamné le 10 décembre 1948 par la Haute Cour à dix ans d’emprisonnement et à l’indignité nationale. Les « libérateurs » traitaient ainsi ceux qui, lors de la tourmente, n’avaient pas fui leurs responsabilités. Mais les occasions de servir allaient encore se présenter. A la maison centrale de Clairvaux, il retrouva son ami Charles Maurras, et naquit entre les deux hommes faits pour s’attirer et se comprendre une amitié extraordinaire, si bien qu’à sa libération en mars 1950, par une grâce signée Vincent Auriol, président de la République, Vallat devint le collaborateur assidu d’Aspect de la France créé trois ans plus tôt. En 1960, il en assurait la codirection avec Georges Calzant. A la mort de ce dernier, en 1962, il en devint le directeur et commença, pour cet ami du président Antoine Pinay et de bien d’autres hommes politiques en exercice, une période d’activité intense.
Installé alors à Annonay, il venait chaque semaine à Paris, et sa chronique sereine, joviale, nourrie de vastes connaissances, n’avait d’égale que le charme de sa conversation. C’était pour le journal qui ne pouvait pas encore s’appeler L’Action Française, la période faste de Pierre Chaumeil, Bernard Faÿ, Henri Massis, Jacques Perret, Louis-François Auphan, Philippe Roussel, François Léger, Jacques Ploncard d’Assac, Jean Brune… Mais la santé de Vallat s’altéra vite.
Au début de 1966 il céda sa charge à Pierre Pujo tout en restant directeur honoraire. Il occupa ses dernières années à ajouter à une oeuvre littéraire déjà bien fournie:
– Charles Maurras n° d’écrou 8321 (Plon,1953),
– Le nez de Cléopâtre (Les Quatre fils Aymon,1957),
– La Croix,les Lys et la peine des hommes (Les Quatre fils Aymon,1960),
quelques autres ouvrages de souvenirs:– Lettres passemurailles,
sa correspondance avec Maurras de mars 1950 à novembre 1952 (La Table Ronde,1966),
– Feuilles de Fresnes 1944-1948 (Lienhart,Aubenas,1971) et,
– Le grain de sable de Cromwell (Lienhart,Aubenas,1972).
Revenons sur La Croix, les Lys et la peine des hommes, son livre essentiel (réédité en 1982 avec une préface de votre serviteur par les éditions Ulysse à Bordeaux) où il montre le parfait accord entre les encycliques pontificales, les déclarations des princes et les actions des élus catholiques et monarchistes sur la question sociale, aussi loin du libéralisme effréné que du socialisme concentrationnaire. A le lire, plein de compassion pour la « misère imméritée » des travailleurs consécutive à la Révolution dite française, on voit l’erreur de ceux qui parlent de Vallat comme de l’homme d’une idée fixe, obnubilé par la seule question juive.
Hospitalisé au cours de l’été 1971, il s’éteignit dans la sérénité et dans une parfaite confiance en Dieu à l’hôpital d’Annonay. Il repose dans une tombe toute simple au cimetière de Pailharès (Ardèche), à l’ombre de son église paroissiale où il avait appris à défendre l’Eglise de l’Ordre.
Michel FROMENTOUX

Jean-Marie le Pen, fondateur du Front National, est la figure contemporaine de la droite nationale. Il nous livre son analyse de la situation politique aussi bien interne qu’internationale en rappelant les causes qui ont entraîné notre pays dans le chaos. La franchise de son analyse rejoint parfois les idées de l’Action Française.
L’Action Française : Comment considérez-vous la situation générale de notre pays d’un point de vue social, économique et politique ?
Jean-Marie Le Pen : Notre pays subit les conséquences des politiques de droite comme de gauche que j’ai dénoncées depuis des décennies. Cette attitude m’a valu la diabolisation médiatique que vous savez.
Les problèmes sociaux que vous évoquez sont la conséquence logique de l’abandon de la Nation. Notre souveraineté et nos spécificités nationales et culturelles ont été délaissées. La France s’est progressivement fondue dans la mondialisation qu’elle a suivie en masse sans savoir en choisir les aspects qui lui sont profitables. Nous avons légué notre indépendance à l’Union Européenne qui s’est érigée en autorité fédérale supérieure au lieu d’être une organisation régionale, nécessaire aux pays de notre continent.
Par ailleurs, nous avons ouvert nos frontières à un nombre considérable d’immigrés sans avoir la capacité de les prendre en charge, de les intégrer et de les assimiler. Une grande partie de ces populations a obtenu la nationalité française avec le droit du sol adopté par notre Code de la nationalité. De nombreux jeunes issus de parents immigrés et vivant sur le territoire ne se sentent pas français.
Il me semble qu’il y a eu une volonté délibérée de détruire notre pays avec sa culture et ses traditions et de construire sur ses ruines une « nouvelle France » avec un modèle cosmopolite. La catholicité culturelle de la France, « fille aînée de l’Eglise », était la cible principale de nos adversaires qui ont transformé la séparation de l’Eglise et de l’Etat en une « laïcité à la française », outrancière, coupant les Français de leurs racines.
L’Action Française : N’avez-vous pas l’impression que les pompiers pyromanes dénoncent ce qu’ils ont favorisé ? Comment expliquez-vous l’islamisation de la France ?
Jean-Marie Le Pen : Au nom de la laïcité et des Droits de l’Homme, des groupes politiques ont œuvré pour la « défrancisation » de notre pays. Ils ont favorisé ce flux migratoire et ont mené un combat acharné en vue de faire disparaître nos traditions, en culpabilisant les Français, en ridiculisant l’Eglise. Certains de ces groupes dénoncent aujourd’hui ce qu’ils ont, par le passé, favorisé.
Personnellement, je ne m’en suis jamais pris aux masses populaires, aux groupes sociaux y compris aux immigrés, mais aux politiques qui sont responsables de cette situation.
Malheureusement, le système politique actuel en France favorise la démagogie. La question migratoire a été instrumentalisée par mes adversaires pour des calculs électoraux, non seulement à mon encontre, mais aussi et surtout contre l’intérêt supérieur de la Nation.
Ainsi donc, la France a perdu progressivement son âme. Sa société s’est « décatholisée » spirituellement et culturellement. Prenons à contrario l’exemple des Anglais, majoritairement anglicans. Qu’ils soient agnostiques ou athées, ces derniers se réclament anglicans, tout en respectant les autres communautés. Cet aspect culturel de l’anglicanisme est préservé aussi bien dans la société anglaise que dans les hautes fonctions clés des institutions. Mieux que la France, l’Angleterre a su préserver son identité et son indépendance, allant jusqu’à sortir de l’Union Européenne.
Quant à nous Français, en renonçant à notre identité et à notre culture, nous avons créé un vide. Par conséquent, une partie de la population issue de l’immigration et originellement de confession musulmane, en quête de repères identitaires, a été séduite par un courant religieux transnational cherchant à substituer l’« Oumma islamiya » à l’appartenance des individus à leurs nations respectives, à l’instar du sionisme qui, dès la fin du XIXème siècle, cherchait à créer une « nation juive » (העם יהודי).
Cette instrumentalisation de la religion à des fins politiques a donc touché une partie de la population en France, grâce à l’émergence des moyens de communication qui ont facilité la propagande des mouvements islamistes. Ces derniers ont, par ailleurs, bénéficié de larges moyens financiers dont l’origine réelle demeure occulte. C’est ainsi que l’islamisation de la France déchristianisée est devenue visible. J’ai assisté à cette déchristianisation progressive de notre société : plus de religieuses voilées dans les rues, plus de prêtres en soutane, plus de femmes franchissant les églises avec des mantilles, etc… Je me souviens aussi de ma mère qui portait la coiffe bretonne ; une manière de manifester une identité provinciale.
Nous avons, hélas, délaissé nos traditions et encouragé d’autres cultures à s’implanter chez nous. Le drame c’est de voir les minorités, visibles et invisibles, commander la majorité et cette dernière de sentir devenir une minorité. C’est ce qui se produit chez nous et qui n’est que la conséquence des politiques destructrices de notre civilisation et de notre nation.
Je ne crois pas à l’existence d’un projet politique téléguidé par les musulmans pour islamiser la France car il n’existe aucune puissance musulmane capable d’établir et de réaliser un tel projet : le monde musulman fait face à de très nombreuses luttes internes.
L’Action Française : Et le terrorisme ?
Jean-Marie Le Pen : Il s’agit d’actes effectués par des mercenaires au profit de groupes politiques étrangers dont on n’est pas encore parvenu à en élucider les vrais meneurs et véritables responsables.
Les actes terroristes ont pour objectif d’adresser un message politique aussi bien à la population qu’aux gouvernements. Mais la plupart du temps ils sont effectués pour faire réagir l’opinion publique, grâce à l’ampleur médiatique donnée à ces événements et à l’interprétation de ces actes par certains journalistes et chroniqueurs.
J’ai constaté que les auteurs de ces actes commis en France ont des noms à résonance arabe (à l’exception d’un Tchétchène). Néanmoins, il y a un bon nombre de Français qui sont convertis à l’Islam et qui sont soumis aux idéologies de l’Islam politique qui n’est qu’une dérive de la religion musulmane. Ils ont, de surcroît, été enrôlés dans les organisations terroristes islamistes tel que Daëch et ont commis les pires atrocités en Syrie voire en Bosnie, en rejoignant les Moujahidines. Curieusement, cette catégorie d’islamistes a épargné la France.
Par ailleurs, les circonstances des actes terroristes commis sur notre territoire ainsi que les interpellations de leurs auteurs, conduisant la plupart du temps à leur élimination physique, me laissent perplexe : Mohamed Merah aurait pu être neutralisé dans l’appartement où il se trouvait par des gaz anesthésiants ; les cartes d’identité de certains auteurs d’attentats auraient été retrouvées dans leurs voitures ; le passeport du kamikaze qui s’est fait exploser au stade de France aurait également été retrouvé intacte, etc…
Je pense que ces terroristes sont formatés pour commettre ces crimes. Certains d’entre eux ont un palmarès judiciaire de grande délinquance. D’autres sont désœuvrés, démunis et fragiles psychologiquement, ce qui facilite leur manipulation à l’instar d’un certain nombre de personnes entraînées par le « jihad », qui vont combattre principalement leurs coreligionnaires au Moyen – Orient.
En France, il existe un certain nombre de personnes présentant le profil idéal pour se faire instrumentaliser. Ces individus sont pour la plupart issus de milieux peu éduqués, pauvres, sans activité professionnelle, ou présentant des troubles psychologiques en raison de problèmes sociaux ou familiaux. Par conséquent, la connaissance des phénomènes migratoire et démographique est indispensable pour comprendre l’ensemble de ces phénomènes.
L’Action Française : « Notre planète souffre d’une poussée démographique », Qu’entendez-vous par là ?
Jean-Marie Le Pen : La population mondiale ne cesse de s’accroître de manière exponentielle. En cent ans, la population mondiale est passée de 2 à 8 milliards de personnes. Ce phénomène est une évidence. Il est surtout observé dans les pays pauvres ou en voie de développement. Prenons l’exemple de l’Algérie. En 1966, la population de ce pays était de 12 millions. Elle est aujourd’hui de plus de 43 millions. Nous allons donc assister, dans les décennies qui viennent, à des déplacements intenses de populations sur la planète. Il s’agit essentiellement de populations des pays pauvres qui sont tentés de s’aventurer, d’aller travailler et de s’installer dans les pays qui leur paraissent plus riches.
Parallèlement, nous allons assister à une sur-industrialisation et donc à des bouleversements climatiques. Ainsi donc, la planète tout entière va assister, en raison de cette poussée démographique, à des catastrophes aussi bien naturelles que socio-politiques : propagation de maladies, virus, pénuries alimentaires et pauvreté. Cela provoquera inéluctablement des déplacements démographiques continus et des problèmes sécuritaires. La pauvreté conduira certaines personnes à commettre des actes portant atteinte à la sécurité et à la stabilité des sociétés. L’état de nécessité sera un fléau planétaire.
Notre pays sera également touché par cette situation. C’est la raison pour laquelle nous devons urgemment adopter des mesures législatives pour la préservation de nos intérêts nationaux.
L’Action Française : Quelle est votre point de vue sur la politique étrangère et sur le monde francophone ?
Jean-Marie Le Pen : Notre politique étrangère doit être animée par deux principes : d’abord et principalement par celui de l’intérêt supérieur de la France, ensuite par nos amitiés historiques avec les nations, comme le soulignait Bainville.
Malheureusement, notre pays a progressivement rompu avec ces principes sous la Vème République en se soumettant aux diktats d’organisations internationales dominées par le monde anglo-saxon (OTAN et l’Union Européenne) et aux groupes de pression (les lobbies). C’est la raison pour laquelle nous avons perdu notre influence et la place que nous occupions sur la scène internationale malgré notre statut de membre permanent au Conseil de sécurité des Nations Unies. Nous avons reculé en Afrique tandis que d’autres pays étendent leur influence sur ce continent à l’instar de la Chine, des Etats-Unis, de la Russie récemment, voire de la Turquie qui est en train de gagner des marchés en Afrique. Ce recul a commencé vers la fin du mandat de Jacques Chirac.
Nous nous sommes éloignés du monde arabe, des pays d’Afrique du Nord avec lesquels nous avons une histoire, pour plaire à Israël. Or, ce dernier est en train de normaliser ses relations avec certains pays arabes qui s’orientent de plus en plus vers le monde anglo-saxon dominé par les Etats-Unis.
L’Action Française : Quelles sont les conséquences de notre inféodation au monde anglo-saxon ?
Jean-Marie Le Pen : Nous n’avons pas pris les choix politiques opportuns vis-à-vis de certains conflits politiques, à l’instar de la guerre en Syrie. Nous avons participé, sous l’impulsion des Etats-Unis et de l’Union Européenne, à la déstabilisation de cet Etat. Cela a conduit à l’émergence des groupes extrémistes : Daëch ou Front Al Nosra, (branche locale d‘Al Qaïda, à laquelle l’ancien ministre des affaires étrangères, Laurent Fabius, avait rendu hommage en exprimant dans un entretien au quotidien Le Monde : [ce groupe] « fait du bon boulot en Syrie » !
En rompant nos relations diplomatiques et notre coopération sécuritaire avec Damas, nous avons été empêchés de lutter contre les « jihadistes » qui menacent notre pays et nos intérêts en portant atteinte à notre sécurité.
Nous avons également, sous l’impulsion de l’OTAN, déstabilisé les institutions et l’Etat libyen ce qui a favorisé le phénomène migratoire. Nous avons suivi et encouragé la propagande relative au « Printemps arabe » qui a permis l’émergence de l’Islam politique, courant qui instrumentalise la religion à des fins politiques et qui a remis en cause plusieurs institutions étatiques du monde arabe avec lequel nous avions des relations historiques. Ces choix politiques masochistes ont contribué au renforcement du fléau migratoire. Des millions de personnes ont été contraintes de fuir les conflits militaires et les massacres.
Historiquement, la France a toujours eu une politique étrangère équilibrée sur la scène internationale, respectueuse des principes généraux du droit notamment celui de la non-ingérence et la non-intervention dans les affaires internes des pays. Elle a aussi joué un rôle catalyseur dans le règlement des conflits.
La France a été entraînée dans des conflits internes en violation de ces principes. En toute objectivité, il faut reconnaître la volonté du Président Macron de faire un pas vers la Russie, de prendre des initiatives pour la Libye, de tenter de calmer les velléités du Président turc, de trouver une issue au blocage de la situation au Liban. C’est le cumul des politiques des gouvernements successifs de la Vème République qui ont affaibli notre rôle et notre place dans le monde.
L’Action Française : Les Français sont-ils las de la république ? Dans quelques mois, notre pays connaîtra de nouvelles élections présidentielles. La campagne électorale débutera très probablement dès l’automne. Qui voyez-vous au sommet de l’Etat ? Quels sont vos pronostics ?
Jean-Marie Le Pen : Il est difficile de prédire. Tout dépendra des événements qui permettront à l’un des candidats d’émerger en profitant de l’actualité, en adoptant un discours qui attirera l’opinion publique en sa faveur et en bénéficiant bien entendu du soutien des médias. Ceux sont les événements qui favorisent les candidats et non le contraire.
Il faut rappeler que les Français se sont lassés des promesses électorales voire du système en général. Les dernières élections régionales l’ont démontré. Ce désintéressement de la politique est également illustré par le déclin des partis politiques, de droite comme de gauche. Les Français ont besoin à la fois de libertés mais aussi d’une autorité rassurante et arbitre. Ce n’est pas vous qui allez me contredire à ce sujet. Il s’agit de la fameuse formule de Charles Maurras : « l’autorité en haut, les libertés en bas ».
L’Action Française : Le Front National est allé jusqu’à changer de nom et adopter une stratégie de dédiabolisation. Comme vous le savez, l’Action Française connait une nouvelle dissidence avec le Centre Royaliste d’Action Française. On nous reproche d’être fidèles aux idées de Charles Maurras ou à la mémoire du Maréchal Pétain. Que pensez-vous de cette stratégie de dédiabolisation ?
Jean-Marie Le Pen : Nos politiques adoptent un langage démagogique pour amadouer l’opinion publique afin d’arriver au pouvoir, ce qui n’était pas mon cas. Il m’a même été reproché par certains de ne pas avoir voulu le pouvoir et sa conquête, ce qui n’est pas vrai. En réalité, je n’ai jamais voulu céder au système (à l’« establishment »), en adoptant le « politiquement correct », en me compromettant et en trahissant mes convictions profondes. Cela m’a valu toutes les attaques aussi bien de la part de mes adversaires politiques que des médias, avec un acharnement inébranlable.
En me succédant à la tête du Front National, Marine a décidé de se rapprocher du système, en le ménageant. Cela lui a permis d’avoir une plus large visibilité médiatique. Elle a progressivement écarté les fondamentaux du parti.
Certains ont suivi l’exemple du Rassemblement National, y compris au sein de l’Action Française, en reniant le combat séculaire de Charles Maurras et de ses compagnons ainsi que la défense de la mémoire du Maréchal Pétain, celle des Harkis, etc…
Je comprendrais que le Front National (ou le Rassemblement National) veuille se dédiaboliser en ménageant le système pour arriver au pouvoir, ce qui n’est pas le cas de votre mouvement politique. L’Action Française n’a pas besoin de se dédiaboliser et de se rapprocher du système car elle n’est pas un parti politique dont l’objectif est la conquête du pouvoir. Votre mouvement préconise un autre système et, par conséquent, n’a pas pour objectif de participer aux institutions de ce dernier.
Notre famille nationale est ainsi morcelée. Certains mouvements qui se disent nationalistes se laissent instrumentaliser par des courants stipendiés par l’étranger qui, comme je l’ai expliqué, ont délibérément encouragé l’état du pays. Ils prétendent aujourd’hui y remédier en semant la zizanie et en encourageant la violence et donc le chaos. Le nationalisme français est construit sur des valeurs positives irréprochables : l’amour et la défense de la Patrie.
Il manque aux nationalistes un chef fédérateur pour redresser la barre. C’est un principe logique et humain. Votre mouvement politique en a payé le prix, en particulier depuis la mort de Pierre Pujo. Il a fallu du temps à sa sœur, malgré son âge avancé et les difficultés qu’elle a endurées, pour redresser l’Action Française et la ressusciter grâce, bien entendu, à votre équipe intègre et fidèle aux principes fondamentaux de votre mouvement qui est appelé à porter l’étendard du nationalisme français.
Propos recueillis par Arnaud Delorme