Lecture : Avec le Christ dans les camps de Mao, Rose Hu Meiyu

Lecture : Avec le Christ dans les camps de Mao, Rose Hu Meiyu

Lutte contre l’immigration, opposition aux politiques corrompues et corruptrices, combat contre le wokisme et les tenants de la repentance, horreurs des mouvements d’extrême gauche et d’extrême centres… les lieux de lutte sont assurément nombreux pour notre jeunesse ! Mais quelle différence, dans cette énumération, avec celle de ceux qui nous précédèrent dans le combat national ! Quelle place subsiste encore de la question algérienne ? Entretient-on encore le souvenir des luttes pour l’Indochine ? Qu’en est-il du combat anti-communiste ? S’attaque-t-on toujours à la mémoire du général De Gaulle – faut-il, d’ailleurs une majuscule ou une minuscule à cette particule ? La majeure partie de la jeunesse militante est assez ignorante de ces combats d’hier…mais sont-ils vraiment d’hier ? Ne récoltons pas les fruits de ces défaites ? Aucune action, sans formation ! Il est bon de se replonger dans les grands événements du XXe siècle et de comprendre les enjeux qui existèrent. Il en est ainsi des horreurs du communisme… faut-il que nous soyons repliés sur nous-mêmes pour ne pas voir que des millions de personne souffrent toujours de ce régime ? Que si, en France, il ne représente plus une force politique proprement dite, il imprègne les mentalités de tout l’arc républicain ? Combien, dans nos milieux, par haine de l’Amérique – haine bien méritée -, tournent leur regards vers l’est, vers des pays comme la Chine… abominable régime. 

C’est pourquoi nous nous félicitons de la réédition, aux éditions Clovis, de ce livre de Rose Hu Meiyu, Avec le Christ dans les camps de Mao. Mes vingt-cinq années dans le goulag chinois .Que de pages d’histoire bouleversantes, loin de la France et pourtant si proches par leur esprit de sacrifices et d’abandon à la Providence. Que de pages qui nous plongent dans cet enfer qui paraît si loin de nous, mais en réalité qui peut nous surprendre si vite ! À voir les choses humainement, il y a des gens qui n’ont pas de chance dans la vie, la Providence semble les tirer toujours plus vers les affres de la vie. Ils naissent au mauvais endroit, au mauvais moment, et les éléments semblent se liguer pour les faire souffrir. Hu Meiyu fait partie de ces gens-là : elle avait une vingtaine d’années quand la Chine devint marxiste, sous la main cruelle de Mao-Tsé-Toung. Oui, le 16 mai 1966, Mao Zedong lançait la « Grande Révolution culturelle prolétarienne », plongeant le pays dans plusieurs années de chaos, dont le nombre de victimes est aujourd’hui estimé entre 1,7 et 2 millions de personnes. Et Hu était catholique – fraîchement baptisée, du nom de Rose –, au sein d’une famille aisée, donc suspecte aux yeux du parti communiste. Le mal n’ignore jamais le bien… c’est de cette manière que le bien se reconnaît si vite ! Elle connut arrestations, procès, condamnation, prison, camps de travaux forcés, accès impossible aux sacrements de l’Église. 

Ce sont exactement vingt-six années qu’elle a passées en détention, dans des conditions parfois inimaginables. Nous n’avons plus idée des atrocités qui furent commises par ces régimes… Ne mentionnons que l’exemple de l’École catholique du Sacré-Coeur ! Durant cet été 1966, le 24 août, l’école, qui fonctionne pour les enfants des diplomates étrangers en poste à Pékin, est attaquée par les Gardes rouges. Alors que tous les missionnaires étrangers ont été expulsés du pays entre 1950 et 1952, sept religieuses étrangères sont encore actives au sein de l’établissement au statut très particulier ; elles sont soumises à des « séances de lutte », l’une d’elles est frappée si violemment qu’elle perd presque un œil. Le lendemain, les religieuses chinoises sont condamnées à vingt de prison et les religieuses étrangères à l’expulsion. Le chemin de Pékin à Honkgong est parcouru dans des conditions épouvantables ; arrivée à Lowu, poste-frontière de la colonie britannique, l’une des religieuses, Sœur Molly O’Sullivan, tombe inconsciente ; les gardes la charge sur une charrette poussée par les autres religieuses. Sœur O’Sullivan meurt le lendemain, dans un hôpital de Hongkong. Est-ce que le désespoir saisit Rose ? Nullement ! Car l’espoir n’est que l’Espérance des imbéciles! Seuls de l’Espérance naît les prodiges de grâce : alors que des chrétiens faiblissent et se compromettent avec le pouvoir, d’autres, munis de la force d’en haut, acceptent cette croix, la portent le front haut, l’âme recueillie, et s’efforcent de monter le chemin du calvaire, donc de s’élever au lieu de descendre, saisissant, dans le malheur, l’occasion divine d’une ascension intérieure. Ils découvrent la joie dans la souffrance.

Non seulement un tel récit permettra aux jeunes générations de se rappeler ce qu’est le communisme… mais ils auront aussi un exemple spectaculaire de résistance aux persécutions ! Qu’est-ce qu’une mauvaise réputation, qu’est-ce que quelques horions, quelques insultes, quand ceux qui nous précédèrent subirent les camps de Mao ? Voici une source d’inspiration aussi bien religieuse que politique ! Sursum corda !

                                                                                                                                                              Staub Guillaume

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Pourquoi le 6 février 1934 a été un échec : l’analyse de Maurice PUJO

Pourquoi le 6 février 1934 a été un échec : l’analyse de Maurice PUJO

Pourquoi les manifestations de janvier et février 1934, dont celle du 6 février, n’ont pas débouché sur ce changement de régime, pour lequel l’Action française s’était toujours battue ? Maurice Pujo, après avoir conduit toute la campagne de l’Action Française sur l’affaire Stavisky et dirigé l’action des Camelots du Roi, en a donné l’explication en termes simples * : sans une Action Française suffisamment forte et reconnue tant sur le plan de la pensée politique que de la conduite de l’action proprement dite, l’union des patriotes est stérile. Et la leçon vaut pour aujourd’hui.

À force de le répéter, les gens du Front populaire ont fini par croire que le Six Février était le résultat d’une terrible conjuration tramée de toutes pièces par d’affreux « fascistes » contre les institutions républicaines.

Rien ne correspond moins à la réalité. Le 6 Février a été, à son origine, le sursaut national le plus spontané, le plus pur d’arrière-pensées. Il a été la révolte de l’honnêteté et de l’honneur français contre un scandale qui était une des hontes naturelles et cachées du régime : le pillage de l’épargne sans défense avec la complicité des gouvernants qui en ont la garde. 

Sans doute, ce scandale a été mis en lumière, développé, « exploité », si l’on veut, par des patriotes conscients qui étaient les hommes de l’Action française. Là-dessus, M. Bonnevay, président de la Commission du Six Février, ne s’est pas trompé lorsqu’il nous a désignés comme les responsables de la mobilisation de l’opinion et de la rue.

C’est nous qui avons publié les deux fameuses lettres Dalimier qui avaient été, aux mains de Stavisky, les instruments de l’escroquerie. C’est nous qui, par nos premières manifestations, avons chassé du ministère ce Dalimier qui se cramponnait. C’est nous qui, pendant trois semaines, encadrant tous les patriotes accourus à nos appels, avons fait à dix reprises le siège du Palais-Bourbon. C’est nous qui, par cette pression sur le gouvernement et les parlementaires, avons arraché chaque progrès de l’enquête, empêché chaque tentative d’étouffement. C’est nous aussi qui avons publié la preuve de la corruption d’un autre ministre, Raynaldi, et c’est nous qui, en rassemblant des dizaines de milliers de patriotes, le 27 janvier, au centre de Paris, avons chassé le ministère Chautemps qui cherchait à se maintenir […]

Tenter le coup ?

Dira-t-on que nous envisagions le renversement du régime ? Eh ! nous ne cessons jamais de l’envisager ! Nous avons, dès nos débuts, proclamé que nous formions une conspiration permanente pour la destruction de la République, cause organique de nos maux, et pour la restauration de la monarchie, qui seule pourra les guérir.

Mais, en menant la chasse aux prévaricateurs complices de Stavisky, nous n’avions pas visé, de façon préconçue, cet heureux événement. Il y avait des services immédiats à rendre à la France ; nous les lui rendions. Si, au terme de cette crise, la restauration de la Monarchie pouvait être tentée, nous n’en manquerions certes pas l’occasion. C’est seulement un fait qu’il n’y a pas eu d’occasion parce que les conditions nécessaires ne se sont pas trouvées réunies.

C’est ce que nous devons répondre à ceux qui, nous faisant le reproche inverse de celui de M. Bonnevay, estiment que nous aurions dû « tenter le coup ». Il y avait sans doute – ce qui est important – un malaise incontestable qui, au-delà des hommes au pouvoir, était de nature à faire incriminer le régime. Il y avait même, à quelque degré, dans l’esprit public, un certain état d’acceptation éventuelle d’un changement. Il y avait aussi l’inorganisation relative et le sommeil des éléments actifs chez l’adversaire socialiste et communiste. Mais ces conditions favorables, en quelque sorte négatives, ne pouvaient suppléer à l’absence de conditions positives indispensables pour avoir raison de cette chose solide par elle-même qu’est l’armature d’un régime resté maître de son administration, de sa police et de son armée. Et il faut un simplisme bien naïf pour s’imaginer qu’en dehors des jours de grande catastrophe où les assises de l’État sont ébranlées, comme au lendemain de Sedan, le succès peut dépendre d’un barrage rompu…

Pourquoi Monk n’a pas marché

Ce qui a manqué au Six Février pour aboutir à quelque chose de plus substantiel que des résultats « moraux », c’est – disons-le tout net – l’intervention de ce personnage que Charles Maurras a pris dans l’Histoire pour l’élever à la hauteur d’un type et d’une fonction, l’intervention de Monk. Un Monk civil ou militaire qui, du sein du pays légal, étant en mesure de donner des ordres à la troupe ou à la police, eût tendu la main à la révolte du pays réel et favorisé son effort. Un Monk assez puissant non seulement pour ouvrir les barrages de police, aussi pour assurer immédiatement le fonctionnement des services publics et parer à la grève générale du lendemain.

La question de ce qu’on a appelé à tort l’échec du Six Février se ramène à celle-ci : pourquoi Monk n’a-t-il pas marché ?

Répondra-t-on qu’il n’a pas marché parce qu’aucun Monk n’existait ? Il est certain que personne ne s’était désigné pour ce rôle. Mais c’est essentiellement un domaine où le besoin et la fonction créent l’organe. Il y aurait eu un Monk et même plusieurs si les circonstances avaient été telles qu’elles pussent lui donner confiance.

Certains s’imaginent qu’ils décideront Monk par la seule vertu de leurs bonnes relations avec lui et dans quelques conciliabules de salon. Singulière chimère ! Monk éprouve très vivement le sentiment de sa responsabilité. Ce n’est qu’à bon escient qu’il acceptera les risques à courir pour lui-même et pour le pays et il a besoin de voir clairement les suites de son entreprise. Devant apporter une force matérielle qui est tout de même composée d’hommes, il a besoin de pouvoir compter, pour le soutenir, sur une force morale assez puissante. Il ne réclame pas de civils armés – c’est là l’erreur de la Cagoule – qui doubleraient inutilement et gêneraient plutôt les soldats, mais il veut trouver autour de lui, lorsqu’il descendra dans la rue, une « opinion » claire, forte et unie.

Et cela n’existait pas au Six Février. Si les manifestants étaient unis par le sentiment patriotique et le mépris de la pourriture politicienne, ils n’avaient pas d’idée commune sur le régime qui conviendrait à la France pour la faire vivre « dans l’honneur et la propreté ». De plus, les rivalités de groupes et les compétitions des chefs empêchaient même que, séparés dans la doctrine, ils pussent s’unir dans l’action.

Depuis le début de l’affaire Stavisky jusqu’au 27 janvier où notre manifestation des grands boulevards renversa le ministère Chautemps, il y avait eu, dans l’action, une direction unique : celle de l’Action française. C’est à ses mobilisations que l’on répondait ; c’est à ses consignes que l’on obéissait. (On lui obéit même le jour où, en raison de la pluie et pour épargner un service plus pénible à la police, nous renonçâmes à la manifestation) Mais, à partir du 27 janvier, devant les résultats politiques obtenus et ceux qui s’annonçaient, les ambitions s’éveillèrent, et les groupements nationaux préparèrent jalousement, chacun de son côté, leur participation à une action dont ils comptaient se réserver le bénéfice. Cette agitation et cette division ne firent que croître, après la démission de M. Chiappe, préfet de police, survenue le 3 février.

Aucune entente

La Commission d’enquête a cherché un complot du Six Février. Mais il n’y avait pas un complot pour la bonne raison qu’il y en avait cinq ou six qui s’excluaient, se contrariaient et se cachaient les uns des autres. Il y en avait dans tous les coins et sur les canapés de tous les salons. On peut se rendre compte qu’il n’y avait aucune entente entre les groupes divers en examinant les rendez-vous qu’ils avaient donné pour la soirée historique, et les dispositions qu’ils avaient prises, sans parler des manœuvres qu’ils firent et dont à peu près aucune n’était d’ailleurs préméditée.

Si, par impossible, les patriotes l’avaient emporté dans de telles conditions, s’ils avaient chassé le gouvernement et le parlement, le désaccord entre eux n’aurait pas manqué d’apparaître presque aussitôt et les gauches vaincues n’auraient pas tardé à reprendre le pouvoir.

C’est à quoi le Monk inconnu, le Monk en puissance, devait songer. C’est pourquoi il s’est abstenu d’une intervention qui aurait été stérile. C’est pourquoi la journée du Six Février n’a pas donné de plus grands résultats.

Maurice Pujo

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Les erreurs de Louis XVI

Les erreurs de Louis XVI

Ces lignes sont parmi les dernières écrites par le grand historien d’Action Française Jacques Bainville, de l’Académie Française. 

Louis XIV avait de l’intelligence et du caractère. Louis XV avait de l’intelligence et manquait de caractère. Louis XVI, avec toutes les vertus, avait une intelligence médiocre et il était indolent. On ne peut pas s’étonner que, malgré les meilleures intentions du monde, il ait perdu la monarchie.

Un hasard malheureux fit encore qu’il avait perdu son père, si bien qu’à Louis XV déjà vieilli succéda un jeune homme de vingt ans, très confit en dévotion, à qui l’on avait surtout appris que le grand-père menait une vie scandaleuse. On imagine bien que les filles du défunt roi avaient Madame du Barry en horreur. Elles avaient endoctriné leur neveu qui ne se contenta pas d’exiler la favorite mais qui se mit à défaire systématiquement tout ce que son prédécesseur avait fait.

Un de ses premiers actes fut de rappeler les Parlements orgueilleux qui tenaient tête à la couronne. Comprit-il très bien ce qu’il faisait ? c’est douteux. Il obéit surtout aux influences qui s’exercèrent sur lui. Mais, dès ses débuts, il s’enfonçait dans une contradiction insoluble et destinée à devenir mortelle. En effet il appelait au ministère un réformateur qui s’appelait Turgot, et les Parlements, défenseurs des droits acquis, s’opposaient à toutes les réformes. Pour réformer le royaume et supprimer les abus, il eût fallu que le roi agît par voie d’autorité. Il avait, d’emblée, entamé la sienne en rétablissant celle de ces magistrats qui s’étaient arrogé le pouvoir de repousser les lois qiu étaient contraires à leurs idées ou à leurs intérêts, bien que la puissance législative fût censée appartenir au souverain.

Combattu et paralysé par les Parlements, ne pouvant faire aboutir ses projets, Turgot dut se retirer. Entre son ministre et les magistrats, le malheureux Louis XVI avait dû choisir et ne pouvant plus revenir sur le mal qu’il s’était fait, ce fut le ministre qu’il sacrifia. Par une contradiction non moins absurde le public lui en fit le reproche, tandis qu’il applaudissait ces parlementaires privilégiés et défenseurs des privilèges qui parlaient un langage insolent et factieux et se présentaient comme les défenseurs de la liberté.

Dès lors Louis XVI s’épuisa dans la vaine recherche d’une amélioration impossible. Il y perdit peu à peu sa popularité. A la fin, impuissant devant les parlementaires unis à la noblesse et au clergé, il se résolut à sauter le grand pas et à convoquer les États Généraux, espérant trouver dans le Tiers État l’appui qui lui était refusé ailleurs.

C’est pourquoi il voulut que la représentation du Tiers État fût doublée. Mais le troisième ordre, ayant autant de députés que les deux premiers, demanda et devait demander à voter par tête. De plus le roi, pour faire entendre la voix de la bourgeoisie, avait invité tous ceux qui avaient des idées à les exposer librement. Ce fut une pluie d’écrits de toutes sortes parmi lesquels figura la célèbre brochure de Sieyès : «  Qu’est-ce que le Tiers État ? Rien. Que doit-il être ? Tout. ».

Louis XVI avait semé le vent. Il récolta la tempête et de plus, faisant ce qu’il avait déjà fait avec Turgot et avec le Parlement, au lieu de suivre la voie qu’il avait lui-même tracée, il vint se mettre en travers. Lorsque les députés du Tiers, forts de leur nombre et de l’autorité qu’il leur avait donné, voulurent transformer les États Généraux en assemblée, il prétendit de son côté maintenir la distinction des trois ordres, conformément aux traditions, aux usages et à l’ancienne constitution du royaume. C’est ainsi que de ses propres mains, Louis XVI fit la Révolution. Pouvait-elle être évitée ? Nous répondrons « Oui, certainement ».

La France avait besoin de réformes. Il fallait y procéder d’autorité et brisant les coalitions d’intérêt qui s’y opposaient. C’est ce que les rois de France avaient toujours fait, ce qu’avait fait encore Richelieu puis Louis XIV. Sans cela la monarchie n’eût pas duré aussi longtemps. Pour être un roi réformateur, il fallait être un roi autoritaire.

N’était-ce pas ce que la France attendait ? Le XVIIIe siècle, dans la personne du plus illustre de ses interprètes c’est à dire Voltaire, avait exalté des souverains qui étaient de purs despotes, comme Frédéric II et Catherine, mais qui imposaient le progrès par le despotisme.

Au fond les Français, en 1789, n’aspiraient pas à la liberté mais à l’égalité, qui en est d’ailleurs exactement le contraire. C’est si vrai que, dix ans plus tard, dix ans seulement, la dictature de Bonaparte était acclamée. Il était vraiment inutile pour en venir là, de mettre la France sens dessus dessous et de faire couler des torrents de sang. Avec des intentions excellentes, l’infortuné Louis XVI avait fait un mal immense. Il l’a expié si durement qu’on ne peut pas avoir la dureté de lui en vouloir. Mais il serait faux de voir en lui une victime de la fatalité.

Supposons un roi qui eût continué la politique commencée par Louis XV dans les derniers jours de son règne. On fût arrivé, sans bouleverser le pays et sans tout détruire, à un état des choses fort semblable à celui que créa le premier consul, lequel, du reste, rétablit et restaura une partie de ce qui avait été détruit dans l’anarchie révolutionnaire.

Finalement, Louis XVIII, qui était fort intelligent, prit la France telle que Napoléon l’avait laissée. Pour en venir là, il était bien inutile d’avoir fait couper la tête d’un roi, d’une reine et d’une quantité de braves gens sans compter tous ceux que vingt ans de guerre avaient tués.

                    Jacques Bainville, de l’Académie Française

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Raison d’AF : Politique d’abord  

Raison d’AF : Politique d’abord  

D’une seule voix, orthodoxes du marxisme et leurs frères jumeaux, les sectateurs du capitalisme s’emploient à nous convaincre que la politique n’est qu’une simple superstructure transitoire et amovible, et lui substituent l’économie en tant que moteur déterminant de l’Histoire ; de sorte que les activités humaines se voient ainsi essentiellement limitées à des échanges entre producteurs et consommateurs, où chacun est supposé trouver son meilleur compte. Peu importe qu’ensuite les groupes humains soient organisés selon les règles contraignantes d’un socialisme totalitaire, ou gérés par la tyrannie des grands intérêts de la finance sans frontières. Ainsi corrompue dans son essence même, la Cité sort inévitablement des voies par lesquelles seules elle peut se faire, conformément à la nature de l’homme, pourvoyeuse du bien commun nécessaire à
son épanouissement.

Mais cette déviation mortelle n’est pas la seule à atteindre la Cité dans son existence même. Si Aristote et St Thomas d’Aquin ont raison, la politique étant connaturelle à l’homme, le « politique d’abord » de Maurras ne fait qu’indiquer l’ordre des moyens dans lequel doivent être posés les actes salvateurs : sans une certaine qualité du temporel, ni l’homme ne peut être heureux ici-bas, ni il ne peut accéder normalement à la perfection ultime à laquelle il est appelé en tant qu’être spirituel. Et Péguy de parler du « grand mystèrede cette ligature du temporel et du spirituel », de cette « incapacité absolue du spirituel de se passer du temporel » !

C’est pourquoi ils sont tout autant les ennemis de l’homme réel et de la Cité ceux qui, niant implicitement la distinction entre l’ordre de la nature et celui de la grâce, croient pouvoir sauter par-dessus les nécessités absolues du politique, pour établir, on se demande bien comment, un esprit juste et de bonnes mœurs, d’où découleraient de bonnes institutions. C’est bien l’ordre social qui prévaut, mais cet ordre ne peut naître ex nihilo ; ce sont les bonnes institutions, et elles seules, qui sont capables de fournir le socle sur lequel fleurissent naturellement les idées droites et permettent l’épanouissement de cette vertu moyenne qu’Aristote fixe comme objectif à l’ordre politique conforme à la raison. Inverser cet ordre est une dangereuse chimère, pour ne pas dire une ineptie, et renvoie aux calendes grecques l’accession au bien commun.

On peut toujours, bien sûr, et on le doit, s’employer au changement des mœurs pour faciliter l’instauration à terme de bonnes institutions ; mais, en vue de celles-ci, la voie la plus conforme à la nature et à la raison est l’action proprement politique, visant le régime en place.

Philippe Champion

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Entretien avec Pierre Hillard 

Entretien avec Pierre Hillard 

Né en 1966, Pierre Hillard est essayiste, docteur en science politique. Ancien collaborateur à l’Action Française 2000 il est spécialiste du « mondialisme ». Ll critique ce qu’il interprète comme un processus technocratique de décomposition des nations et d’unification du monde. Nous l’interrogeons sur don dernier ouvrage qui fait débat dans le milieu nationaliste. 

L’AF – Après vos nombreux ouvrages sur le mondialisme : La Décomposition des nations européennes : de l’union euro-atlantique à l’État mondial (2004), La Marche irrésistible du nouvel ordre mondial (2007), La Fondation Bertelsmann et la gouvernance mondiale (2009) et Chroniques du mondialisme(2014), pourquoi ce nouvel ouvrage, « Comprendre l’Empire loubavitch » ? 

Pierre Hillard : En fait, j’ai voulu connaître le rôle et les ambitions des Loubavitch largement inconnus du public français. Depuis de nombreuses années, je me suis intéressé à l’histoire du monde rabbinique. La non-reconnaissance de la messianité du Christ a conduit ce milieu à élaborer un corpus qui n’est plus le mosaïsme préparant l’arrivée du Christ via les annonces faites par de nombreux prophètes comme Isaïe, Zacharie, Ézechiel, Michée etc., mais le Talmud, corps de doctrine religieux, civil et politique élaboré de 100 à 500 ap. J-C. Violemment anti-chrétien car châtiant le Christ dans des excréments bouillants, le Talmud se doit d’être relié à la kabbale qui est l’interprétation ésotérique du judaïsme. En raison de ces caractéristiques, on ne peut absolument pas utiliser l’expression civilisation « judéo-chrétienne ». Le mosaïsme a été parachevé par le Christ et, désormais, l’Église est le nouvel Israël au sens spirituel du terme. Le judaïsme mosaïque n’existe plus. En raison de cette évolution, l’Église utilise l’expression la « synagogue aveugle » pour désigner le monde rabbinique resté fidèle à l’idée d’un « messie » venant uniquement pour la gloire d’Israël aux dépens des nations. En raison de cette espérance, on peut observer l’apparition de nombreux « messies » cherchant à capter l’attention des masses juives, ces dernières attendant leur « libérateur ». Or, il existe une faction de ce milieu qui a développé l’idée d’un « messie » libérateur sur fond de bouleversement apocalyptique. Cette tendance qui fut visible avec les « messies » Sabbataï Tsevi (1626-1678) et Jacob Frank (1726-1791) a conduit une part du monde rabbinique à s’opposer violemment à ces personnages cherchant à favoriser le mal en tout genre (guerres, famines, génocides, etc.). L’échec de ces « messies » a engendré au cours du XVIIIème siècle le hassidisme dont la finalité est de combiner le caractère intellectuel du Talmud à celui de la kabbale tout en atténuant son aspect apocalyptique. C’est à partir de ce milieu qu’apparaît le monde loubavitch, héritier de cette pensée en y mêlant un idéal messianique ne pouvant aboutir que sur le temps long et sous une forme de chaos. Le but de cet ouvrage est d’expliquer les origines profondes de cette mouvance, ses caractéristiques et son ascension extraordinaire aux États-Unis puis dans le monde entier au lendemain de la Seconde guerre mondiale.

L’AF – Peut-on considérer votre ouvrage comme un aboutissement ? 

Pierre Hillard : Disons que mon livre est la présentation d’un milieu très puissant et influent qui peut être considéré comme un moteur essentiel dans la propagation du mondialisme qui est un messianisme. J’invite les lecteurs de l’Action Française à prendre conscience de la puissance du monde loubavitch qui a su, entre autres, convaincre Donald Trump de déplacer l’ambassade américaine de Tel Aviv à Jérusalem en 2017. D’autres surprises attendent le lecteur…

L’AF – Le mondialisme peut-il clore l’histoire ? Quelle espérance ?

Pierre Hillard : Comme il a été précisé dans la question précédente, le mondialisme est un messianisme. Cela signifie que pour les tenants de cet « idéal », il faut détruire le monde issu de la Révélation ; c’est-à-dire l’Église et les États s’inspirant de son enseignement. La Révolution de 1789 et Vatican II ont été les parfaits instruments pour les tenants de cette doctrine. Je renvoie les lecteurs à mes ouvrages, en particulier l’Atlas du mondialisme. Cependant, malgré le caractère humainement désespéré de la situation, l’espérance chrétienne doit nous soutenir. On ne peut comprendre la situation du monde dans lequel nous vivons qu’en raison d’un arrière-fond d’essence satanique. Si ce dernier a pu progresser, c’est en raison d’une effroyable ignorance de la part des patriotes français qui ne connaissent pas la pensée de nos adversaires, leur vocabulaire et la finalité de leurs ambitions. J’espère que mon livre Comprendre l’Empire loubavitch aidera à combler ces lacunes. 

Pour information, Comprendre l’Empire loubavitch est disponible uniquement sur BookEditions. Deux versions sont proposées. La première version est à 26 euros avec 26 annexes en noir et blanc. La seconde version est à 37 euros avec 19 annexes sur 26 en couleur.

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Mésaventure d’un petit livre

Mésaventure d’un petit livre

Chaque livre a une histoire insignifiante, baroque ou cocasse. Je pense que celle de mon ouvrage Vraie et fausse laïcitéressort de cette dernière catégorie comme on pourra en juger.

Ce livre est issu d’une conférence tenue en 2022 au Centre d’études et de prospection sur la science. Après l’avoir retranscrite, j’ai soumis mon texte à la Diffusion de la pensée française (DPF). Les patrons de cette librairie en ligne, réputée auprès des gens de chez nous, me donnèrent leur accord pour une publication. Pour lui donner plus d’impact, ils cherchèrent et trouvèrent un préfacier. Tout ceci en plein accord avec moi. Après avoir pris connaissance du texte non seulement la personne contactée refusa de rédiger une préface, ce qui était son droit le plus absolu, mais elle déconseilla à la DPF de publier un ouvrage en désaccord avec la foi selon son appréciation. Pour en avoir le cœur net, DPF soumit mon livre à un théologien qui confirma ce jugement. La société DPF me fit donc savoir qu’à son grand regret, elle ne pouvait éditer mon ouvrage. Fin du premier acte.

C’est alors que je me suis tourné vers les éditions d’Action française qui me donnèrent rapidement leur accord. Un premier tirage eut lieu. À ma grande surprise, ce fut dans les abbayes et les couvents que le livre se vendit le mieux. Dans un endroit que je ne citerais pas, il fut même lu aux moines durant leur repas pour leur édification personnelle. Je n’en demandais pas tant : vous avouerez que pour un livre qui contredit la foi, c’était quand même assez cocasse. Fin du deuxième acte.

Mais l’histoire ne s’arrête pas là. Après une première édition, il y en eut une seconde qui bénéficia d’une splendide préface de monsieur l’abbé de Tanouarn que je remercie ici. Chacun aura pu la lire dans le dernier Echo d’Action française et constater qu’il ne m’adresse aucune critique que ce soit sur le plan historique ou sur le plan théologique, bien au contraire.

Loin de moi de prétendre que ce petit livre est parfait. La preuve en est, c’est que la deuxième édition a été revue et augmentée. Mais s’il y a une leçon à tirer de tout cela c’est que l’on a trop tendance chez nous à confondre les vérités dogmatiques qui sont peu nombreuses mais indiscutables avec nos idées personnelles qui, elles sont contestables. C’est le cas de la laïcité. En effet, à qui fera t-on croire que ce concept n’a pas varié, même dans l’Église ? Que cette notion était entendue de la même façon par saint Augustin et par saint Thomas d’Aquin, par exemple ? Que les idées de Pie IX étaient celles de Grégoire VII ? Et que l’application de ces idées n’a jamais variée à travers ces deux millénaires ? Tout cela est absurde. Il y a donc plusieurs manières d’entendre la laïcité fondée par le Christ.

Le rôle de l’historien n’est pas de juger et de condamner, comme c’est trop souvent le cas aujourd’hui mais d’expliquer autant que faire se peut les raisons de ces différences, ce qui est beaucoup plus difficile que de distribuer des bons et des mauvais points. Cela permet le dialogue. Cela permet aussi d’avancer, alors que l’inverse ne mène à rien de constructif.

Certains pourront m’objecter que je suis mal placé pour me plaindre puisqu’en toute logique je devrais commencer par défendre chez les autres cette liberté de critique que je revendique pour moi-même. C’est vrai, mais, à cela je répondrais : qu’un théologien plus compétent que moi dans son domaine, ait présenté des objections à la lecture de mon texte, me semble parfaitement normal. Ce qui l’est moins, à mon avis, c’est qu’il n’ait pas cru utile de me les faire connaître ni de m’en exposer les raisons. Il ne suffit pas de dire qu’un livre est dangereux pour la foi pour qu’il le soit,même lorsque l’on est théologien. Il faut argumenter. Il ne l’a pas fait. Je n’ai donc rien changé, pour l’essentiel, au premier texte que les éditions d’Action française ont eu la courtoisie d’éditer et qu’elles viennent de rééditer… et je ne m’en repends pas. 

Fin du troisième et dernier acte de cette petite histoire qui, pour ma part, je dois l’avouer, m’a plutôt amusée.

Ouvrage à commander sur notre  boutique en ligne :  https://editionsdactionfrancaise.fr/

                                                  Philippe Prévost 

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