Dreyfus toujours là ! 

Dreyfus toujours là ! 

Il est vrai que nous connaissons la capacité de la République à faire le mal et que plus rien ne peut nous étonner.

Mais si nous sommes convaincus que rien de bon ne peut sortir de pareilles institutions, force est de constater que le personnel politique ne manque pas d’imagination et excelle dans l’infamie.

En effet, au florilège des méfaits républicains de ces derniers temps, on retiendra surtout l’unanimité avec laquelle les députés ont voté le 2 juin dernier, la proposition de loi de Gabriel Attal : élever Dreyfus au grade de général ! (Et pourquoi pas au grade de maréchal de France puisqu’on y est ?) Véritable union parlementaire dans la trahison, cet acte, quoique n’ayant rencontré que très peu d’écho, en dit long sur l’état de putréfaction avancé du régime.

D’abord (cela saute aux yeux de tout patriote de bon sens) : par cette législation, les misérables laquais de Tel-Aviv qui prétendent représenter les Français nous donnent raison : il n’y a pas en République de séparation entre l’État et la Synagogue. Cette élévation de Dreyfus au grade de général de brigade montre que « l’Affaire » est loin d’être terminée.

« Le capitaine Dreyfus est bien plus grand que le capitaine Bonaparte. Il a conquis la France et il l’a gardée », écrivait Louis-Ferdinand Céline (1).

Chaque nouvelle revanche de Dreyfus doit renforcer encore davantage notre volonté de libérer la France de cette immonde République, règne de l’étranger. Il fallait voir d’ailleurs quel était l’enthousiasme des élus de la droite casher de Marine Le Pen, si prompts à se présenter continuellement comme les derniers remparts de l’honneur français… Rien n’est plus insupportable que de voir ce parti de renégats acheter aux bourreaux de Gaza un électorat au prix d’un silence complice, celui du sang de l’innocent.

Jamais nous ne répéterons assez le danger que constituent les fausses oppositions républicaines, qui entretiennent l’espoir d’une renaissance française par les urnes et qui gaspillent l’argent, les énergies et le peu de temps qu’il reste aux Français pour sauver ce qui peut encore l’être. Ces fausses oppositions font en réalité partie du problème. Notre travail doit aussi et surtout consister à casser ce rêve démocratique des Français et à dénoncer l’imposture des partis, quels qu’ils soient.

« La Maçonnerie, (…), a peu à peu accaparé, confisqué la République qui est devenue sa chose, sa vache à lait, sa métairie. Et c’est ce qui explique que les ——, maîtres de la Maçonnerie, soient par là même maîtres de la France », écrivait Édouard Drumont (2).

Les États confédérés que l’Action Française dénonce et combat ne sont pas un mythe : la réalité saute aux yeux. La France est occupée et Dreyfus est plus présent que jamais. La seule manière de le combattre efficacement est d’en finir avec la République, ce cancer qui ne cesse de métastaser.

1- Bagatelle pour un massacre, 1937

2- La Tyrannie maçonnique, 1899

LA RÉDACTION

LAÏCITÉ

LAÏCITÉ

« Philippe Prévost a composé son livre – Vraie et fausse laïcité – sur la laïcité et son histoire, plus exactement sur les variations de l’idée de laïcité dans l’histoire, sur la manière dont s’opposent, se confondent ou bien finissent par s’harmoniser un pouvoir temporel et un pouvoir spirituel, tous deux consécutifs, l’un avec l’autre, de l’ordre humain. »

Abbé Guillaume de Tanouärn

En France, le concept de laïcité a été conçu au XIXᵉ siècle comme une machine de guerre contre le catholicisme par une coterie judéo-protestante.

La laïcité “à la française” se présente en outre, sous la plume de Vincent Peillon, ancien ministre de l’Éducation nationale, comme une nouvelle religion qui coifferait les autres religions et apporterait à la République ce supplément d’âme qui lui manque.

Religion de liberté, pensera-t-on…

Face à cette fausse laïcité, il existe heureusement une vraie laïcité et donnée par le Christ.

En partant de l’observation, Aristote a constaté que l’homme était un animal social, que les idées sont des faits de nature et qu’il n’est donc nul besoin de faire intervenir les dieux pour expliquer la politique ou le droit. Le Christ alla plus loin puisqu’il sépara la politique du religieux. Il ne les opposa pas mais les distingua : à César les corps, à Dieu les âmes.

Distinction facile à faire en théorie mais difficile à réaliser en pratique, comme on le constate dans l’histoire. Tantôt (comme dans le Haut Moyen Âge) on assista à une confusion du spirituel et du temporel, tantôt, après la réforme grégorienne, le ciel voulut dicter sa loi à la terre, alors que depuis la Réforme et la Révolution, nous assistons à l’inverse. Tant et si bien que depuis le Concile Vatican I, certains papes comme Pie IX et Pie X ont revendiqué une pleine indépendance pour l’Église. D’autres papes, comme Léon XIII, Pie XI et ceux du dernier Concile, sont revenus à une politique de collaboration : celle du Ralliement… Mais alors, « un pape a-t-il le droit d’excommunier ses fidèles pour des raisons purement politiques ? »

De toute façon, par sa nature même, l’État a besoin de l’Église afin d’éviter de devenir totalitaire. Comme le disait Pascal : « la tyrannie consiste en un désir de domination universelle et hors de son ordre ». L’Église de son côté a besoin de l’État : « elle veut vivre avec l’État dans la communauté particulière où les deux représentations se tiennent l’une à côté de l’autre, comme des partenaires », comme l’a voulu le Christ. La saine laïcité, c’est finalement un équilibre entre deux cités émanant toutes deux de Dieu mais sous deux angles différents…

« Allant sans crainte au plus profond du jeu humain, Philippe Prévost découvre que l’on ne peut envisager la politique sans sa finalité spirituelle, ni le spirituel sans une incarnation politique. Appuyé sur les meilleurs historiens, Georges de Lagarde, Michel Villey ou Jean-Marie Mayeur, sachant résumer les situations les plus complexes avec une clarté fulgurante, mettant sans cesse la clarté de son esprit d’historien en concurrence avec les intuitions de son tempérament de chercheur, notre auteur nous emmène dans un extraordinaire périple théologico-politique dans lequel se construisent, temporelle et spirituelle à la fois, toute l’aventure humaine, telle qu’elle s’est jouée des origines à nos jours en Europe. »

C’est cette histoire mouvementée où les torts ne sont pas tous du même côté, loin de là, que retrace ce livre clair, concis, argumenté. Un sommaire détaillé permet de trouver une réponse à ses interrogations ou défis.

Vraie et fausse laïcité, Philippe Prévost, Éditions d’Action Française, 14 €. A commander sur notre boutique en ligne : https://editionsdactionfrancaise.fr/

Fumer sur la plage : une leçon d’arc-en-ciel

Fumer sur la plage : une leçon d’arc-en-ciel

Les mégots dans le sable m’ont toujours dégoûté, c’est presque aussi pénible que ces gens qui emmènent au matin leur chien faire ses besoins là où les enfants feront un peu plus tard leurs châteaux. J’en ai pourtant tiré jadis un bon profit, cinq centimes de franc pour deux filtres, au prix du sucre d’orge, c’était une manne. Mais il est maintenant interdit de fumer sur la plage, ainsi l’ont décidé les petits enfants de 68. Ils en paraissent fiers et satisfaits. Une avancée, disent-ils. Plus surprenant, les Français d’ordinaire ronchons ne regimbent pas. Il semble devenu bien, reçu et légitime d’interdire. Pourquoi ? Parce que c’est mal de fumer.

Admettons. Mais ce n’est quand même pas mal au même point que tuer, violer, voler, ou voter pour l’extrême droite. Il y a des tas de choses qui sont un peu mal et qu’on n’interdit pas sur la plage : casser les oreilles des voisins avec des sons divers, parler comme un charretier, manger des saletés, laisser des papiers gras, et tant d’autres… Pourquoi ce consensus, pourquoi cette ardente obligation reconnue par tous de ne pas fumer sur la plage ? Quelle est la leçon de cette morale ? Elle est double, je crois. Fumer à la plage lèse à la fois le sentiment général et la raison.

Nous sommes convertis, au Nord et à l’Ouest, au devoir supérieur de nous sauver en sauvant la planète, ainsi nous le disent, impératifs et catégoriques, la Santé et l’Environnement. La plage est le lieu du retour à la nature et sa pureté, le contact avec ce grand tout primordial qu’est la mer, nous ne devons pas plus la souiller que nous ne devons souiller ou laisser souiller nos propres poumons. Ce serait une incivilité XXL. Au moins là, au moins une fois par an, quitte à se gaver de bulots mayonnaise pour compenser, soyons irréprochables. Ainsi apaiserons-nous notre fragile sensibilité et pourrons-nous rôtir heureux.

Mais il y a plus important encore : le respect de la raison supérieure qui régit désormais l’humanité. Même si nous n’éprouvions pas dans notre chair qu’il est mal de fumer à la plage, même si l’instinct ou l’intuition ne nous le suggérait pas, nous le saurions sûrement parce que la Science nous le dit. Elle a établi que les tabagismes actif et passif sont des nuisances pour la santé publique, et que la combustion des cigarettes et leurs déchets polluent. Il n’y a plus besoin de commandements, de code ni d’Églises pour dire le bien et le mal : la Science souveraine les détermine. Le consensus scientifique est la voie, la source et la voix de notre morale. Il est notre vie, il suffit de le suivre en toute occasion, à tout moment. De l’intime à la politique, il nous guide tout et tous, en tout. C’est très reposant.

Mme Figueres, patronne de la CCNUCC (Convention-Cadre des Nations Unies sur les Changements Climatiques) et comme telle principale artisan des Accords de Paris sur le climat en 2015, l’a très bien expliqué. Au sommet de Doha, en 2012, elle définissait le « processus global du changement climatique » comme « une transformation complète de la structure économique mondiale ». Puis elle précisait : « Nous influençons les gouvernements, le secteur privé et la société civile pour réaliser la plus grande transformation jamais entreprise. La Révolution industrielle transforma également le monde, mais elle n’était pas guidée selon une perspective centralisée. Il s’agit ici d’une transformation centralisée parce que les gouvernements ont décidé d’écouter la science. »

Comme les maîtres de la révolution arc-en-ciel : écoutons la science, ne fumons pas à la plage, et dormons sur nos deux oreilles.

Martin Peltier 

Jean-Pax Méfret ? Présent !

Jean-Pax Méfret ? Présent !

Jean-Pax Méfret ? Présent !“On ne connaissait pas ça, nous, le verglas. Ni la neige, d’ailleurs. En fait, on ne connaissait pas le froid. Le vrai froid. Celui qui te gèle les os, t’engourdit les mains, te brille les oreilles, te fait claquer les dents. À Alger, en dessous de dix degrés, on mettait un manteau. Ici, à Rouen, en ce mois de décembre 1962, il fait moins quinze !”

Nous savons à l’Action Française que les erreurs de l’intelligence sont les pires de toutes. Soixante ans après les terribles événements d’Algérie, trop de compatriotes ont oublié ce qui s’est passé, le sang qui a coulé, les larmes versées, les familles détruites ! Mais aussi les mensonges, les trahisons, les erreurs politiques… Un pays qui fut divisé, une guerre civile subsistante dans la droite ligne des événements qui affaiblissent la France depuis 1944 et notre pseudo-victoire. Ni oubli, ni pardon.

Quand nous pensons que les patriotes, pour ne prendre qu’un exemple, se réclament aujourd’hui du gaullisme ! Quelle amnésie ou quelle veulerie face à l’histoire des événements d’Algérie ! Relisons notre regretté Gérard Bedel : « De Gaulle obéissait, d’une manière plus ou moins consciente, aux puissances d’argent, en particulier aux États-Unis, hostiles par principe et par intérêt aux empires coloniaux. Ajoutons qu’il n’aimait pas les Français d’Algérie qui avaient été fidèles à l’amiral Darlan et au général Giraud et n’apprécièrent jamais l’homme de Londres. De Gaulle avait aussi besoin d’avoir les mains libres pour la grande politique européenne et mondiale qu’il méditait et qui n’apporta à la France que des réussites verbales » (Gérard Bedel, Le gaullisme. Maladie sénile de la droite).

Et que dire de tous ces Français qui se trouvèrent exilés et sans rien après la chute de l’Algérie aux mains des terroristes ! C’est une de ces voix qui s’exprime dans ce nouveau livre de Jean-Pax Méfret : Jean-Pax Méfret, Sur l’autre rive… en 1962, Pygmalion, 2025.

« Dans une France peu concernée par le dramatique exode d’un million de Français d’Algérie, un adolescent pied-noir, aguerri par des années de violence, se fraye un chemin dans un univers souvent hostile. Il vient d’avoir dix-huit ans. Il sort de prison politique et porte sa douleur en bandoulière. C’est le temps du rejet, des centres d’accueil improvisés, des repas de la soupe populaire, des poches vides, des fripes trop grandes et des regards blessants. Jean-Pax Méfret relate son itinéraire, balisé d’humiliations, de rancunes et d’illusions perdues, qui constituaient, à l’époque, le quotidien du monde parallèle de ces immigrés malgré eux ».

Un magnifique témoignage de ce qu’ont dû vivre ces pauvres pieds-noirs, la tragédie des rapatriés d’Algérie française, héros de la fidélité, et ce mépris des métropolitains à leur arrivée en 1962. Quelle gloire d’un côté, quelle bassesse de l’autre ! Repensons aux déclarations abjectes du “Parrain de Marseille” qui ne voulait pas les recevoir et qui ont lentement conduit la cité phocéenne à être désormais colonisée par ceux-là même qui les avaient chassés, ne leur laissant le choix qu’entre la valise et le cercueil.

Le témoignage résonnera dans bien des mémoires et bien des cœurs français et permettra aussi une nouvelle mise en perspective des questions d’actualité ! Un livre à mettre entre les mains de toutes les jeunes générations !

                                                                            Guillaume Staub 

Vous pouvez vous procurer ce livre chez notre partenaire Livres en famille :

https://www.livresenfamille.fr/algerie-histoire-guerres/6257-sur-l-autre-rive-en-1962.html
Doctrine : La démocratie religieuse de Charles Maurras

Doctrine : La démocratie religieuse de Charles Maurras

Voici un enseignement de Maurras capital et d’actualité à l’heure où un nouveau pontificat affronte les questions que pose à l’Église la crise actuelle des intelligences. Dès le début du XXᵉ siècle, Charles Maurras, pourtant « catholique du porche », mais dont l’âme restait déchirée de ne pas encore comprendre que le catholicisme est le vrai, savait en tout cas qu’il était le bien pour sa patrie comme pour toute la civilisation. Aussi s’étonnait-il, et plus encore souffrait-il, de voir la démocratie – ce principe de rébellion contre tout ordre naturel et surnaturel – professée par des intellectuels catholiques allant jusqu’à voir en elle l’avenir du christianisme et à exalter les droits de la conscience individuelle. Cette démocratie religieuse lui apparut tout de suite comme la transcription politique d’une erreur religieuse.

S’abstenant d’empiéter dans le domaine religieux, il résolut de dénoncer ce péché de l’intelligence dont les conséquences pour la cité politique pouvaient être désastreuses. D’où les trois livres écrits entre 1906 et 1913 et qu’il devait rassembler en 1921 sous le titre La Démocratie religieuse. Le premier, Le dilemme de Marc Sangnier (1906), le deuxième, La politique religieuse (1912), et le troisième L’Action française et la religion catholique (1913), montrent que le devoir des Français conscients de leur formation est de défendre l’Église contre la République, car celle-ci ne peut que répandre les idées et les comportements les plus hostiles au catholicisme traditionnel. Plus d’un siècle plus tard, nous mesurons la justesse des prévisions de Maurras : un moment contenu grâce à saint Pie X, le venin s’est infiltré dans l’Église à la faveur de la « condamnation » de l’Action française en 1926, puis des débats suscités dans les années 1960 autour du concile Vatican II.

L’ÉGLISE DE L’ORDRE

Nous nous en tiendrons ici à l’introduction du premier livre, car, magnifique hommage « À l’Église romaine, à l’Église de l’Ordre », elle reflète toute l’admiration de Maurras pour l’Église, non seulement parce que celle-ci est utile à l’ordre dans la cité, mais, surtout, parce qu’étant l’Ordre même, elle est la force qui ordonne, qui oblige à une discipline des puissances de la raison et du cœur et qui apporte à l’intelligence des certitudes.

Citons : « Tout ce que pense l’homme reçoit, du jugement et du sentiment de l’Église, place proportionnelle au degré d’importance, d’utilité ou de bonté […] Rien au monde n’est comparable à ce corps de principes si généraux, de coutumes si souples, soumis à la même pensée, et tel enfin que ceux qui consentirent à l’admettre n’ont jamais pu se plaindre sérieusement d’avoir erré par ignorance et faute de savoir au juste ce qu’ils devaient. La conscience humaine, dont le plus grand malheur est peut-être l’incertitude, salue ici le temple des définitions du devoir. »

De tels bienfaits ont à jamais marqué un peuple. « Quiconque se prévaut de l’origine catholique en a gardé un corps ondoyé et trempé d’habitudes profondes qui sont symbolisées par l’action de l’encens, du sel ou du chrême sacrés mais qui déterminent des influences et des modifications radicales. De là est née cette sensibilité catholique, la plus étendue et la plus vibrante du monde moderne, parce qu’elle provient de l’idée d’un ordre imposé à tout. »

Un exemple : la prédication de l’amour. Aux antipodes de la « fraternité » révolutionnaire, l’Église a « préservé la philanthropie de ses propres vertiges et défendu l’amour contre la logique de son excès. » D’où ces « nobles freins » qui n’altèrent pas le sentiment, mais font que, de ce que « Dieu est Amour », l’on ne puisse pas déduire que « tout amour est Dieu » !

Il en est de même de l’individualisme : « En rappelant le membre à la notion du corps, la partie à l’idée et à l’observance du tout, les avis de l’Église éloignèrent l’individu de l’autel qu’un fol amour-propre lui proposait tout bas de s’édifier à lui-même […] La meilleure amie de chaque homme, la bienfaitrice commune du genre humain sans cesse inclinée sur les âmes pour les cultiver, les polir et les perfectionner, pouvait leur interdire de se choisir pour centre. » On est bien loin des Droits de l’Homme !

Quant aux droits des humbles, la charité et le réalisme catholiques ne les érigent pas en révolte. Leur sort est lié à celui des grands. « S’il y a des puissants féroces, [l’Église] les adoucit pour que le bien de la puissance qui est en eux donne tous ses fruits ; s’ils sont bons, elle fortifie leur autorité en l’utilisant pour ses vues, loin d’en relâcher la précieuse consistance. » C’est ainsi qu’elle a civilisé les Francs…

JE SUIS ROMAIN

Tant de qualités que l’Église tient de la sagesse avec laquelle elle a intégré les leçons de Rome. Et c’est alors la page sublime où Maurras dit son amour pour la Rome des consuls, des bâtisseurs, des empereurs et des papes : « Je suis Romain dès que j’abonde en mon être historique, intellectuel et moral. Je suis Romain parce que si je ne l’étais pas je n’aurais plus rien de français […] Je suis Romain par tout le positif de mon être […] Par ce trésor dont elle a reçu d’Athènes et transmis le dépôt à notre Paris, Rome signifie sans conteste la civilisation et l’humanité. Je suis Romain, je suis humain : deux propositions identiques. »

Bien sûr, toute immixtion de la démocratie dans ce corps si achevé de doctrine et de pratiques ne peut que l’altérer et en diminuer les possibilités de bienfaisance. Quand le croyant n’est pas catholique ou cesse de l’être pleinement, il « dissimule dans les replis inaccessibles du for intérieur un monde obscur et vague de pensées ou de volontés que la moindre ébullition, morale ou immorale, peut lui présenter aisément comme la voix, l’inspiration et l’opération de Dieu même. » Chacun peut alors se prétendre en ligne directe avec Dieu, avant de se mettre tout simplement à Sa place. Alors la société s’émiette, car « il faut définir les lois de la conscience pour poser la question des rapports de l’homme et de la société. » Là est bien le drame de la France quand l’épiscopat adopte un profil bas face à la République, mère porteuse du désastre que nous subissons.

Michel Fromentoux

Humeur du temps : encore la violence ! 

Humeur du temps : encore la violence ! 

Ce n’est pas qu’il y ait le moindre plaisir à revenir sur un sujet assez commun et déjà abordé ; mais il serait plus injuste de nous intenter ce procès-là que de faire comme si la plus pressante actualité n’étalait pas sous nos yeux le fait que la violence est bien devenue l’un des éléments les plus fondamentalement constitutifs de la vie sociale française ; et donc, hélas ! un inépuisable et justifié sujet de réflexion politique. « Une odeur de violence plane désormais sur la France », écrit J.-P. Brighelli ; c’est peu dire ! Et de constater : « On s’enflamme pour des riens. On agresse pour pas grand-chose. On attaque les forces de l’ordre qui n’osent pas riposter, parce qu’un coup de feu tiré aujourd’hui serait payé très cher demain. »

Deux points peuvent fixer notre réflexion.

Le premier est la constatation du fossé qui ne cesse de s’élargir entre ceux pour qui la violence est devenue le mode privilégié de manifester leur existence, et les autres, boursouflés de couardise légaliste, tristes géniteurs de lendemains qui déchantent, parce qu’ils témoignent à chaque instant de la profonde vérité de l’affirmation de Soljénitsyne, selon qui « celui qui n’est pas intérieurement préparé à la violence est toujours plus faible que celui qui l’exerce ».

Le second point, infiniment plus grave, concerne l’action de l’État républicain, apparemment incapable d’apporter une réponse proportionnée à ces violences multipliées et multiformes. Pourquoi ? Par déni de réalité, certes ; déni par peur, par sédimentation de peurs ; mais quelles peurs exactement ? Peur de l’impuissant qui se retrouve soudain face à un adversaire trop fort pour lui ? Sans doute un peu ; mais surtout panique, véritable inhibition plutôt, qui l’obligerait à constater que les sacro-saints principes fondateurs de la société multiethnique et multiculturelle promue depuis plus d’un demi-siècle ne sont que les germes morbides de la désagrégation de la France ; une inhibition à l’image caricaturale de cet imbécile de gauche qui tente de persuader que des violences ethniques sont en fait des émeutes de la misère.

Alors, au contraire de Brighelli qui annonce la guerre civile, on peut penser que le « coup de feu tiré aujourd’hui », au nom d’un État soucieux de l’union qui préside au bien commun, en éviterait sans doute demain de bien plus nombreux et de bien plus dramatiques, qui seraient ceux d’une guerre étrangère dont l’ennemi a été installé dans la Cité.

Philippe Champion

La pire des masculinités toxiques ? Le transgenrisme !

La pire des masculinités toxiques ? Le transgenrisme !

Les féministes férues d’études de genre condamnent avec la plus grande fermeté ce qu’elles nomment en leur jargon « masculinité toxique », c’est-à-dire les aspects et normes de comportement masculins qu’elles affirment néfastes pour la société et pour les hommes eux-mêmes. En particulier tout ce qui a trait à la domination, entraine la violence familiale, conjugale, sexuelle, l’homophobie, la mysogynie, le fait de prendre trop de place dans le métro en écartant les jambes, de boire des bières en faisant griller des entrecôtes ou de hausser les sourcils au ciel devant une lesbienne aux cheveux roses porteuse d’un anneau dans le nez.

En fait elles ont presque raison. S’il n’existe pas de masculinité toxique (naître et être mâle, comme être et naître femelle, n’est ni bien ni mal, c’est une des deux façons pour un être humain d’exister), il existe bien un masculinisme toxique, c’est-à-dire une façon empoisonnée et empoisonnante de considérer le sexe masculin. Et la forme pire de ce travers a un nom : transgenrisme. En voici la preuve. Le transgenrisme est la manifestation la plus éclatante de la division de l’humanité en deux sexes. En effet, de deux choses l’une : soit un transgenre naît homme et entend devenir autre chose (le plus souvent femme, quelque fois lapin ou bégonia), soit un transgenre naît femme, et il entend aussi devenir autre chose, par exemple femme.

Prenons le premier cas, celui d’un individu né homme. Qu’il prenne des hormones, qu’il subisse l’ablation du pénis et des gonades, une mammoplastie et une vaginoplastie, ou non, il a la prétention d’être femme. Or, les TERF (trans-exclusionary radical feminists) l’ont fort bien remarqué, non seulement il se fourre le doigt dans l’oeil jusqu’à l’omoplate, mais il perpètre une grave agression contre les femmes. Né homme, il n’a rien connu de la réalité physique des femmes, ni de leur réalité mentale et sentimentale, ni de leurs contraintes sociales : il prétend seulement incarner, avec la plus grande naïveté, le fantasme qu’il s’est fait de la femme, un fantasme masculin. D’ailleurs, dans certains cas limites, cela s’est vu dans une prison anglaise pour un trans qui n’avait pas subi de chirurgie, cela se concrétise par des viols de ses prétendues « congénères ».

Voyons maintenant le cas des femmes qui veulent devenir hommes. Pourquoi ce choix ? Pour se conformer aux préjugés dominants, pour devenir le mâle alpha qui les excitait en tant que femmes. Pour échapper à la condition de femme telle que le décrit le féminisme. En somme, pour devenir un mâle toxique. CQFD : de quelque manière qu’on prenne la question, le transgenre est un masculiniste toxique. C’est d’ailleurs assez naturel puisque la dysphorie de genre est une folie.

                                                    Martin Peltier 

Tribune du prince Charles-Philippe d’Orléans: Quand la langue meurt, la France vacille

Tribune du prince Charles-Philippe d’Orléans: Quand la langue meurt, la France vacille

La langue française, fruit d’une histoire millénaire, est bien plus qu’un outil de communication : elle est un héritage, un trésor, un acte de civilisation. Elle est le fil conducteur de notre histoire, le miroir de notre culture et le pont vivant entre les peuples qui partagent notre mémoire, nos valeurs et notre vision du monde. Pourtant, ce trésor est aujourd’hui en péril. Son influence décline, sa présence s’efface, et son avenir est menacé par l’indifférence, l’oubli, et parfois même la honte.

Ce que révèle, entre les lignes, le rapport au Parlement sur la langue française remis en mars 2025 par la Délégation générale à la langue française et aux langues de France, c’est une forme de résignation officielle. On y constate les reculs, mais on les accompagne avec des mots prudents. Or, c’est d’un sursaut dont nous avons besoin. Ce rapport illustre que la République ne défend plus activement sa langue ; elle la laisse vivre… ou mourir. L’anglicisation croissante des institutions, des entreprises et de l’enseignement supérieur est le symptôme le plus visible de ce déclin. Dans les instances européennes, la proportion de textes rédigés en français est passée de 40 % à moins de 5 % en deux décennies. Dans nos universités, il n’est plus rare que les masters s’intitulent en anglais, que les cours se donnent en anglais, et que l’on exige des étudiants français qu’ils rédigent leur mémoire dans une langue qui n’est pas la leur. Ce phénomène n’est pas un progrès : c’est une abdication.

On invoque l’international, on invoque la modernité, mais au fond, c’est le symptôme d’un effacement. Le monde du travail lui aussi s’aligne. Il ne suffit plus de parler un français impeccable : il faut aujourd’hui « pitcher », « manager », « networker ». Ces glissements ne sont pas anecdotiques. Ils nous habituent à penser que le français serait incapable d’exprimer la complexité du monde contemporain, comme si notre langue — celle de Pascal, de Montesquieu, de Hugo, de Senghor ou d’Albert Camus — était devenue obsolète.

La science, la technologie, la recherche : tous ces champs d’excellence cèdent à l’uniformisation anglophone. Un chercheur qui publie en français, aujourd’hui, limite sa carrière ; un étudiant qui ose s’exprimer dans sa langue à l’oral est perçu comme provincial. Et dans ce contexte, comment s’étonner que le niveau général de maîtrise du français recule chez les jeunes générations ? À force de le reléguer, nous le perdons. À force de croire qu’il se défendra seul, nous le laissons s’effacer.

Il est tentant de se tourner vers l’Afrique, continent francophone d’avenir, pour se rassurer. Mais même là, les signaux sont fragiles. L’enseignement du français y subit la concurrence croissante de l’anglais, du mandarin, ou de langues vernaculaires réhabilitées à juste titre. Dans de nombreux pays africains, le français reste langue d’élite, langue d’examen, mais perd en ancrage populaire. Et dans les pays francophones du Nord, les signes sont tout aussi inquiétants. Au Québec, le recul du français est désormais chiffrable. Sur l’île de Montréal, le français n’est plus que la langue maternelle d’un habitant sur deux. La loi ne suffit plus : c’est une culture du respect de la langue qu’il faut rétablir.

Ce que nous vivons n’est pas un simple phénomène d’évolution linguistique. C’est un effacement organisé, encouragé par une forme d’impérialisme linguistique globalisé. On présente l’anglais comme une langue neutre, universelle, naturelle. Mais elle est d’abord la langue d’un empire économique et culturel qui ne dit pas son nom. Accepter sa domination sans condition, c’est consentir à la disparition progressive de notre propre imaginaire, de nos subtilités, de nos nuances, de notre manière de dire le monde.

Et comment ne pas s’indigner des propos de Jean-Luc Mélenchon, pour qui “le français n’est pas la langue de la République” ? Cette déclaration, indigne d’un ancien élu de la Nation, trahit non seulement une méconnaissance flagrante de notre histoire, mais surtout un renoncement coupable à ce qui fait le socle même de notre contrat social. La République française s’est construite par la langue, autour de la langue, grâce à la langue. C’est elle qui a unifié les provinces, transmis les lois, structuré l’école et façonné l’imaginaire républicain. La réduire à un simple “instrument colonial”, comme il l’a laissé entendre, c’est confondre héritage et oppression, c’est jeter l’opprobre sur ce qui a permis l’émancipation de millions d’hommes et de femmes. La francophonie n’est pas une forme de néo-impérialisme : elle est une communauté de destin, un espace de pensée, de création et de liberté. Quand un responsable politique attaque sa propre langue, c’est sa propre nation qu’il mine. Et c’est le peuple qu’il trahit.

La langue française n’est pas une survivance du passé. Elle est un levier pour penser l’avenir. Elle offre une alternative à la brutalité de certaines logiques économiques, à l’utilitarisme pur qui domine aujourd’hui les échanges internationaux. Elle porte une vision du monde faite de mesure, de clarté, de rigueur et de beauté. Refuser sa marginalisation, c’est refuser une vision appauvrie de la mondialisation.

Mais il ne suffit pas de déplorer. Il faut agir. Il faut investir massivement dans l’enseignement du français en France comme à l’étranger. Il faut faire du français une langue de travail dans tous les secteurs, y compris les plus innovants. Il faut exiger des institutions européennes et internationales qu’elles respectent la diversité linguistique. Il faut cesser de penser que la technologie impose l’anglais : les outils numériques doivent être francophones aussi, et même d’avant-garde. Il faut aussi que l’État lui-même cesse de se contredire : on ne peut pas promouvoir la francophonie à l’UNESCO et imposer des intitulés en anglais dans les ministères.

La langue française est un trésor que nous devons chérir et protéger. Elle n’est ni dépassée, ni ringarde, ni repliée : elle est moderne, vivante, précise, inventive. Elle est une clef de lecture du monde, une manière de vivre ensemble, un héritage universel. Elle est un projet collectif.

Je suis, par ma naissance, l’héritier d’une tradition millénaire. Mais je crois que l’héritage n’est pas une nostalgie : c’est une responsabilité. Avec mon épouse, la Princesse Naomi, nous avons voulu faire du Prix Hugues Capet un lieu où l’on célèbre non seulement les figures de l’histoire, mais aussi ceux qui, aujourd’hui, défendent la langue, la littérature et la culture françaises. Car c’est dans la langue que se tient le cœur vivant d’un peuple. La France sans sa langue ne serait plus tout à fait la France. Et sans la France, le monde perdrait une voix singulière, une conscience vigilante, une promesse de liberté.

Cette tribune est une invitation à réfléchir sur l’importance de la langue française, et à agir, enfin, pour sa préservation et son rayonnement. Il est encore temps. Mais il ne faut plus attendre.

Prince Charles-Philippe d’Orléans

Maurras parle, Votre bel aujourd’hui 

Maurras parle, Votre bel aujourd’hui 

« Une patrie, ce sont des champs, des murs, des tours et des maisons ; ce sont des autels et des tombeaux ; ce sont des hommes vivants, père, mère et frères, des enfants qui jouent au jardin, des paysans qui font du blé, des jardiniers qui font des roses, des marchands, des artisans, des ouvriers, des soldats, il n’y a rien au monde de plus concret.

Le patriotisme n’est pas seulement un devoir. C’est un plaisir. 

« Pour ma part, disait Ulysse aux bons Phéniciens, je ne sais rien de plus agréable à l’homme que sa patrie. » Il le disait d’un pauvre rocher sur la mer. Comment parlerons-nous de la nôtre ? En est-il de plus belle, plus digne d’être défendue ?

Qui, un jour se penchant dans l’embrasure d’une haute colline ou vers quelque vallon ouvrant sur le fleuve et la mer, ne s’est pas arrêté, suspendu, presque sidéré par un chœur imprévu de couleurs et de formes demi-divines ?… 

La patrie est une société naturelle ou, ce qui revient absolument au même, historique. Son caractère décisif est la naissance. On ne choisit pas plus sa patrie – la terre de ses pères – que l’on ne choisit son père et sa mère. On naît Français par le hasard de la naissance. C’est avant tout un phénomène d’hérédité.

Les Français nous sont amis parce qu’ils sont Français ; ils ne sont pas Français parce que nous les avons élus pour nos amis. Ces amis sont reçus de nous ; ils nous sont donnés par la nature… Rien ne serait plus précieux que d’avoir des Français unis par des liens d’amitié. Mais, pour les avoir tels, il faut en prendre le moyen et ne pas se borner à des déclarations et à des inscriptions sur les murs.

Certes, il faut que la patrie se conduise justement. Mais ce n’est pas le problème de sa conduite, de son mouvement, de son action qui se pose quand il s’agit d’envisager ou de pratiquer le patriotisme ; c’est la question de son être même, c’est le problème de sa vie ou de sa mort… Vous remercierez et vous honorerez vos père et mère parce qu’ils sont vos père et mère, indépendamment de leur titre personnel à votre sympathie.

Vous respecterez et vous honorerez la patrie parce qu’elle est elle, et que vous êtes vous, indépendamment des satisfactions qu’elle peut donner à votre esprit de justice ou à votre amour de la gloire. Votre père peut être envoyé au bagne : vous l’honorerez. Votre patrie peut commettre de grandes fautes : vous commencerez par la défendre, par la tenir en sécurité et en liberté. Le patriotisme n’a pas besoin d’un idéal, socialiste ou royaliste, pour s’enflammer ; car il naît de lui-même, du sang et du sol paternels. Ce qu’il faut saluer, c’est le suprême sacrifice de la vie fait sur le sol qu’il s’est agi de défendre. Ce sol sacré serait moins grand, moins cher, moins glorieux, moins noble et moins beau si les Français de toute origine et de toute obédience n’y payaient pas en toute occasion nécessaire la juste dette de leur sang. Plus haut que l’armée et que le drapeau, plus haut que la plus fière conscience de la patrie, vit la patrie même, avec les saintes lois du salut public. Ce sont elles qui font consentir à de durs sacrifices pour défendre l’intégrité du reste et préserver son avenir. Qu’elle vive d’abord ! »

                                   Charles Maurras, Votre bel aujourd’hui, 1953

PIERRE GAXOTTE ET LA RÉVOLUTION FRANÇAISE 

PIERRE GAXOTTE ET LA RÉVOLUTION FRANÇAISE 

Voici un livre indispensable pour libérer à tout jamais les esprits bourrés par « l’école de la République». Plus possible de voir dans la « glorieuse » Révolution dite française l’irrésistible mouvement de révolte d’un peuple opprimé et de croire que les massacres de 1793 n’ont été que des bavures dans un élan sublime et spontané… Les faits sont connus, les textes abondent, les témoignages s’imposent.

Pierre Gaxotte les a méticuleusement étudiés: dès la première édition de sa Révolution française en 1928, l’ouvrage fut salué par Léon Daudet comme un « livre-bombe », et la critique historique de l’événement de 1789 s’en trouva transformée, mais l’auteur, sans cesse à l’affût des progrès de la recherche, a retravaillé son texte, et c’est un livre amplement remanié et richement argumenté qui parut sous le même titre en 1962 chez Fayard dans la collection des Grandes Études historiques. Depuis lors, si la science historique s’est encore enrichie, elle n’a nullement contredit les conclusions de Pierre Gaxotte.

SITUATION DIFFICILE NON INSOLUBLE

À lui tout seul déjà, le premier chapitre, tableau à la fois précis et très vivant des institutions monarchiques, envoie dans les poubelles de l’Histoire toutes les idées reçues. D’abord il faut bien savoir que « ce n’est pas dans un pays épuisé, mais dans un pays florissant et en plein essor qu’éclata la Révolution ». Le pays le plus peuplé d’Europe respirait à pleins poumons au rythme de ces républiques aristocratiques ou populaires que constituaient les provinces, les villes, les métiers, et que fédérait, tout en respectant leurs usages, la personne du Roi. Existaient aussi depuis Louis XV les grands services publics « que Napoléon n’aura qu’à relever pour faire figure de créateur »…

Toutefois Gaxotte n’idéalise pas l’Ancien Régime: certaines parties de l’édifice menaçaient ruine, d’autres, devenues pesantes, étaient ressenties comme inutiles et vexatoires, tels les droits féodaux. Et surtout, si le pays était riche, l’État, lui, était pauvre; la misère existait, quoique moins qu’ailleurs en Europe, mais le plus grave résidait dans un système fiscal devenu aberrant dont beaucoup avaient des raisons de se plaindre et que les privilégiés n’entendaient pas laisser réformer. Tel était le grand problème qui se posait à la monarchie; il n’était nullement insoluble.

Seulement voilà: « une crise intellectuelle et morale » avait atteint « L’âme française jusqu’en ses profondeurs». Là est le vrai drame du XVIIIe siècle: non « dans la guerre, ni dans les journées de la Révolution, mais dans la dissolution et le retournement des idées. Émeutes et massacres n’en seront que la traduction éclatante et sanglante. Quand ils auront lieu, le mal sera depuis longtemps accompli. »

CRISE DE L’AUTORITÉ

Gaxotte expose alors la « doctrine » révolutionnaire dont Fénelon, en inspirant aux rois le dégoût de leur propre pouvoir, avait été le précurseur (« Le roi de Fénelon est condamné au Ciel et à la guillotine, après avoir, la main sur la conscience, fait le malheur de ses sujets et conduit son peuple à la défaite et à l’anarchie. ») Ce fut ensuite la prédication individualiste des « Philosophes » insinuant le doute sur toutes les traditions, propageant la naturalisme et l’athéisme, se gargarisant d’abstractions et de formules déclamatoires, exaltant la vertu telle qu’elle devrait parler en chaque homme dépouillé de l’acquis de la civilisation et revenu au merveilleux « état de nature »… Il fallait en somme « régénérer » le citoyen, au besoin l’y contraindre, car alors « sa mauvaise volonté est un crime contre la Vertu ». Outre le fait que ces apprentis-sorciers justifiaient dès 1750 la Terreur de 1793-94, Gaxotte, à la suite de Taine, montre que ces « beaux esprits » étaient organisés: loges, sociétés littéraires, acadé-mies, plus tard les clubs, fabriquaient sans cesse des initiés inventant la dynamique de groupe et « faisant » l’opinion.

Ainsi bien vite, les détenteurs de l’autorité, et jusqu’au roi lui-même, se mirent à douter de l’utilité du commandement et, dès lors, la crise financière de l’État devint, à la veille de la Révolution, insoluble. Une réforme s’imposait; on préféra l’aventure d’une révolution… Le mélange de prétentions archaïques chez les privilégiés et d’inepties philosophiques chez les intellectuels ne pouvait que devenir explosif. Dure réalité qui éclata dès l’ouverture des fameux Etats généraux où les représentants du peuple – des phraseurs, des idéologues, des hommes de salon, des avocats sans cause, des curés athées – élus hors des réalités vivantes, s’érigeant bientôt en représentants de la nation face au roi qui en avait toujours été la tête, mirent en moins de six semaines tout l’édifice financier par terre. Ils avaient bien d’autres soucis…

L’ENCHAINEMENT DES CONSÉQUENCES

Les chapitres suivants, impeccablement charpentés, toujours précis, jamais rébarbatifs, ne font que révéler de 1789 à 1799 l’inexorable enchaînement des conséquences du dévergondage intellectuel et moral.

De l’émeute en quelque sorte légitimée par le roi lui-même qui par bonté se lia les mains en saluant le Paris révolté trois jours après le 14 juillet, aux déclamations sentimentales et larmoyantes des orateurs de la Constituante qui allaient devenir des bêtes assoiffées de sang sous la Convention…, Pierre Gaxotte, au rythme des Journées où s’enterraient les illusions, montre que la terreur et ses atrocités ont été, non seulement en 1793, mais dès juillet 1789, le développement implacable des idéologies désincarnées ayant toute liberté pour fondre sur le peuple démoralisé, dès lors que son protecteur naturel, le Roi, était ligoté, paralysé, avant d’être immolé sur l’autel du « peuple souverain »; « Sur le grand peuple qui se tait, règne le petit peuple qui parle, les Jacobins. »

On peut lire et relire ces pages sans jamais se lasser; nous les recommandons tout spécialement aux étudiants. Elles sont un modèle de clarté, de concision, parfois d’ironie mordante, car l’auteur ne craint pas de tremper sa plume dans l’encre de Voltaire (pour le style seulement, bien sûr…).

Quand, à la fin du cataclysme, survint le 18 brumaire, début de la dictature napoléonienne visant à concilier le besoin (enfin revenu) d’autorité et l’idéologie démocratique, ce fut, dit Gaxotte, un « expédient de théoriciens aux abois ». C’est, hélas, sur cet expédient que la France vit depuis plus de deux siècles, titubante et jamais satisfaite, faute d’avoir eu le courage de chasser définitivement les idéologies mortelles et de revenir à son Roi.

                                                                     Michel Fromentoux